“Après le déjeuner j’ai faim l’aprèm. Après le diner, j’ai faim la nuit. On a tout le temps faim!”, témoigne Robert, incarcéré en France. La nourriture servie par l’administration est bien souvent insuffisante en quantité, et mauvaise, quand elle n’est pas servie encore congelée, comme constaté au Royaume-Uni et aux Pays-Bas. En Irlande, le diner est servi au milieu de l’après-midi, et les personnes détenues attendent ensuite 16 heures jusqu’au repas suivant. L’attente est identique en Belgique.
Pour ne pas connaître la faim ou éviter la malnutrition, il faut pouvoir acheter de la nourriture. Robert résume la situation ; “soit t’as de la thune pour t’acheter des trucs, soit tu crèves la dalle.”
L’inflation est encore plus marquée dans les prisons et les prix flambent. Un même produit coûte 10 à 15 fois plus cher qu’il y a quelques années en Belgique, en Pologne, ou au Royaume-Uni. En France, un changement de prestataire en Auvergne Rhône-Alpes a fait exploser le prix du café qui affiche une augmentation de 255 %. Le petit-déjeuner a tout de suite un autre goût.
Si la promiscuité, l’absence d’intimité et d’installations sanitaires sont souvent des critères rédhibitoires dans le choix d’un hôtel, ils sont la norme en prison. Le luxe souvent inatteignable, derrière les barreaux, c’est avoir des toilettes, une douche, parfois de l’eau chaude. Dans de nombreux pays, tels qu’en Belgique, en Norvège et en Roumanie, les douches sont collectives et situées à l’extérieur des cellules, ne permettant aucune intimité devant les autres personnes détenues et les surveillant.es. En Belgique, seules deux à trois douches sont autorisées par semaine, et des dysfonctionnements, des travaux ou du manque de personnel restreignent encore cet accès. L’eau chaude se fait souvent rare. : “Cela fait seize ans qu’été comme hiver je me lave à l’eau froide chaque matin, et combien de fois l’ai-je fait à l’eau glacée ?”, confie une personne détenue en Italie.
Si la douche est un luxe, les toilettes aussi. Elles ne sont pas forcément cloisonnées en Espagne, et il n’y a pas de séparation totale aux Pays-Bas. En France, “rien ne sépare les toilettes, qui sont juste à côté d’un espace pour cuisiner. C’est humiliant.” explique Ryan*.
Les personnes détenues doivent donc faire leurs besoins devant leur co-détenu.es. En Norvège, certaines cellules d’isolement sont équipées de toilettes à la turque, dont la chasse d’eau doit être actionnée depuis l’extérieur par un.e surveillant.e. D’autres cellules ne sont tout simplement pas équipées de toilettes, même dans des bâtiments construits récemment. L’attente pour accéder aux toilettes communes peut être longue. En Belgique, certaines personnes détenues font leurs besoins dans des seaux hygiéniques qu’elles vident chaque jour à la “décharge”. Il n’y a pas toujours d’eau courante en cellule.
En Géorgie, le manque de lumière naturelle et de voies d’aération est tel que l’oxygène vient à manquer dans certaines cellules, provoquant des problèmes de santé. La décoration sur les murs est bien loin des dorures des grands hôtels : la moisissure envahit les cellules et les douches collectives, notamment aux Pays-Bas, Portugal, en Belgique.
Les nuisibles occupent, eux aussi, les lieux. Rats, punaises de lit et autres indésirables sont partie intégrante des prisons en Belgique, en Espagne, en France, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, ou encore en Roumanie.
Deux à trois m² par personne, pas d’eau courante, pas de toilettes ni de douches, une minuscule fenêtre en guise de paysage, et le temps, lourd, impossible à tromper en l’absence d’activités, de contacts avec les proches. L’image idyllique en prend un coup, remplacée par celle de l’indignité. Aucun voyageur, aucune voyageuse, même avec une offre all inclusive alléchante, n’accepterait de dormir entouré.e de moisissures et de rats.