Contributeur(s)Human Rights Center (HRIDC)

Populations spécifiques

La surpopulation carcérale, jusqu’en 2013, est l’un des principaux problèmes du système pénitentiaire. Elle connaît une hausse constante de 2004, année de l’adoption de la politique « Zéro tolérance » en matière de crime, à 2013.

Avec une population carcérale de 23 469 détenus et un taux d’emprisonnement de 521,8 pour 100 000 habitants en janvier 2012, la Géorgie détenait l’un des taux d’incarcération les plus élevés au monde. Un processus de réforme est amorcé, en septembre 2012, suite à un scandale concernant les mauvais traitements infligés aux détenus et l’élection d’un nouveau gouvernement, en octobre de la même année. Comme première mesure, une loi d’amnistie est signée le 12 janvier 2013, entraînant la mise en liberté d’environ 3 000 prisonniers et des réductions de peine pour environ 10 000 autres.

Le nombre de personnes détenues est de 7 638 en 2013, avant d’augmenter de nouveau à 10 525 en 2015. Cette augmentation observée au cours des deux dernières années est le fait d’un taux de récidive élevé. Le manque de préparation à la sortie et de programmes de réinsertion en faveur des sortants participent à la non prévention de la récidive. Les anciens détenus sont confrontés à des conditions de vie médiocres et un taux de chômage important.

Prévenus

14 %

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30/09/2015
/ World Prison Brief

L’établissement pénitentiaire N5 de Roustavi est la seule prison réservée exclusivement aux femmes. En février et mai 2015, des visites de suivi de cet établissement sont effectuées par le Comité des droits de l’homme (HRIDC) conjointement avec l’Unité du mécanisme national de prévention. Les femmes détenues sont également incarcérées dans les établissements pénitentiaires N2 de Koutaïssi et N3 de Batoumi.

Les femmes se plaignent des fouilles corporelles intégrales humiliantes qu’elles subissent. Ces fouilles sont effectuées lorsqu’elles entrent en prison, lorsqu’elles quittent la prison temporairement et lorsqu’elles y retournent (ordonnance 97 du ministre). Pendant ces fouilles, les femmes doivent se dévêtir ou laisser à découvert certaines parties de leur corps. Selon les Règles de Bangkok (règle 19), la dignité et le respect des femmes détenues doivent être garantis pendant les fouilles corporelles.

Les femmes incarcérées dans la prison N5 reçoivent des soins prénatals et peuvent garder leurs enfants auprès d’elles jusqu’à l’âge de trois ans. Cette prison dispose d’un quartier mères/enfants, avec 12 cellules et une salle de jeux commune pour les enfants. En mai, six femmes détenues sont incarcérées dans ce quartier, dont une femme enceinte. Elles demandent à l’administration pénitentiaire davantage de matériel destiné aux enfants, des fruits et des légumes dans les repas fournis par la cantine et une augmentation du nombre de colis autorisés aux enfants.

Les femmes ne peuvent pas bénéficier de visites conjugales, bien qu’elles soient prévues par le Code de procédure pénale.

Lors de la visite effectuée par le Comité des droits de l’homme (HRIDC), deux détenues mineures de l’établissement N5 n’étaient pas séparées des adultes, ce qui est contraire aux Règles Mandela.

Femmes détenues

3,1 %

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30/09/2015
/ World Prison Brief

Le Parlement géorgien adopte le Code de justice pour mineurs le 12 juin 2015. Ce code vise à renforcer les principes d’une justice réparatrice à l’égard des mineurs. Il est accueilli favorablement par les ONG.

Il existe un centre de réhabilitation pour mineurs dans la prison N11 de Tbilissi et un quartier pour mineurs à la prison N8 de Gldani et N2 de Koutaïssi. L’âge minimum d’incarcération est de 14 ans. Les mineurs placés en détention provisoire sont incarcérés dans la prison N8 de Gldani. Ils sont au nombre de 11 en juillet 2015 et sont séparés des adultes. Lorsqu’ils sont escortés au tribunal, ils sont transportés avec les adultes. L’administration ne dispose que d’un seul véhicule et d’une seule escorte.

Le Centre pour les droits de l’homme (HRIDC) invite le ministère des Prisons à affecter des psychologues et des assistants sociaux supplémentaires à la prison N8 et à mettre en place des programmes culturels et éducatifs.

En 2015, le HRIDC effectue une visite à la prison N11 pour la quatrième fois dans le cadre des visites conjointes avec l’unité du MNP du Bureau de l’Ombudsman.

Conformément à la loi, les détenus de la prison N11 ont droit à de courtes visites et aux appels téléphoniques. Ils peuvent bénéficier de longues visites et d’appels vidéo après paiement de frais. Cette pratique est dénoncée par le HRIDC. Il existe deux pièces meublées dans l’établissement pour les visites longues. Les mineurs détenus rencontrent rarement les membres de leur famille en raison des frais de transport qui peuvent être élevés au regard des situations de grande précarité de leur famille.

Les mineurs détenus jouent au rugby et au football sur un terrain de jeux deux fois par semaine. Ils reçoivent des cours de menuiserie trois fois par semaine, durant lesquels ils apprennent à fabriquer des croix et des maquettes d’églises. L’administration prévoit l’organisation de cours collectifs pendant les vacances scolaires pour leur apprendre à apposer des décors émaillés.

Des instruments de musique sont accessibles et des musiciens sont régulièrement invités pour dispenser des cours aux détenus. Les mineurs bénéficient de cours d’informatique. Les jeux vidéos sont autorisés.

Une église orthodoxe est située dans la cour de la prison N11. Aucun prêtre n’y est affecté jusqu’à présent.

Des activités socio-culturelles sont menées dans la prison N11. Les comportements problématiques n’en demeurent pas moins nombreux. Les enfants ont du mal à formuler les difficultés qu’ils rencontrent. L’intervention de psychologues et autres spécialistes doit être conduite de façon plus soutenue.

Les auteurs d’infractions sexuelles sont, pour leur propre sécurité, isolés des autres détenus.

Mineurs détenus

0,5 %

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30/09/2015
/ World Prison Brief

Les personnes détenues doivent être informées, dans une langue qu’elles comprennent, des chefs d’accusation qui sont retenus contre elles. Selon le Centre pour les droits de l’homme (HRIDC), les femmes étrangères de la prison N5 manquent d’informations sur les procédures judiciaires qui les concernent. Il n’existe aucun interprète qualifié. Dans cet établissement, les assistants sociaux n’ont aucune connaissance du russe et de l’anglais et ne peuvent leur fournir un accompagnement approprié.

Les détenues russophones de la prison N5 se plaignent de l’absence de chaînes russes dans le bouquet de chaînes. Selon le Ministère des prisons, un transfert vers la diffusion numérique permettra l’augmentation du nombre de chaînes de télévision.

Dans l’établissement N11 pour mineurs, peu d’ouvrages en langues étrangères sont accessibles dans la bibliothèque et aucun en langue azerbaïdjanaise. Les azerbaïdjanais n’ont pas accès à une littérature rédigée dans leur langue et aucun programme scolaire spécifique ne leur est destiné.

Les détenus étrangers sont principalement condamnés pour possession ou trafic de stupéfiants, vol et cambriolage. Ils sont majoritairement de nationalité turque, azerbaïdjanaise, arménienne et iranienne.

Étrangers détenus

3 %

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30/09/2015
/ World Prison Brief

Il n’existe pas de discrimination majeure fondée sur le sexe, l’ethnie ou la religion à l’égard des personnes détenues à la prison N5. Certains détenus font état de pressions subies de la part de détenus pratiquant les coutumes orthodoxes. À la suite de ces plaintes, l’administration transfère les personnes n’ayant pas de pratique religieuse dans d’autres cellules.

L’orientation sexuelle est un sujet tabou dans la société géorgienne. Les agents doivent être formés pour aborder cette question pendant les visites des centres de détention. Les personnes LGBTI doivent être en mesure de s’exprimer en toute sérénité lorsqu’elles sont aux prises avec des problèmes.

Les anciens détenus politiques accusés d’espionnage, ainsi que les personnes victimes de détention arbitraire présumée ont encore le statut de « top secret ». La mise en place d’une commission visant à identifier de potentielles erreurs judiciaires est à ce jour encore reportée.

Yuri Vazagashvili est assassiné sur la tombe de son fils, le 20 janvier 2015, à Karafila. Des explosifs sont installés au cimetière et se déclenchent lorsque Yuri Vazagashvili marche dessus. Un fonctionnaire de police est jugé coupable de ce meurtre et est condamné à 20 ans d’emprisonnement.

Besik Khardziani, homme d’affaires, est assassiné le 28 mars 2015, à proximité de son domicile à Tbilissi. Il avait été condamné à huit ans d’emprisonnement, en 2011, pour fabrication et possession illégale de stupéfiants. Il effectue alors deux ans de détention sans jamais reconnaître les faits dont il est accusé. Le Président lui accorde une grâce en 2014. Après sa remise en liberté, Khardziani accuse d’anciens hauts dirigeants gouvernementaux d’avoir commandité son arrestation. Il affirme que son emprisonnement est arbitraire et dénonce des conditions de détention inhumaines. Peu avant son décès, Khardziani avait entamé des poursuites judiciaires afin de reprendre possession des biens perdus en raison de son arrestation.

Les personnes âgées ne sont pas incarcérées dans des établissements distincts.

Il existe des dispositions visant à libérer les personnes âgées qui répondent aux critères suivants :

  • Avoir effectué la moitié de sa peine
  • Avoir plus de 70 ans   

Le Centre pour les droits de l’homme (HRIDC) fourni une assistance juridique à deux femmes âgées (T.J et V.B), condamnées à la prison N5, qui répondent aux critères juridiques de mise en liberté (sections 11 et 12 de l’article 4 de l’ordonnance N/181/N01‐72/N). La commission mixte refuse de les libérer sans argumenter sa décision. L’administration pénitentiaire soutient pourtant qu’elles doivent être libérées en raison de la dégradation de leur état de santé.

La plupart des détenus souffrant de handicaps sont incarcérés dans les établissements pénitentiaires N18, N19, N15, N8, et N17. Les infrastructures pénitentiaires ne répondent pas aux besoins spécifiques des personnes handicapées. Il n’existe aucun accès pour fauteuil roulant. L’accès aux tribunaux et aux bureaux d’avocats peut se révéler difficile.

Dans la prison N19 et N8, les personnes en fauteuil roulant doivent se faire accompagner par leurs codétenus pour se rendre aux bureaux des avocats. Le personnel pénitentiaire n’est pas formé à prendre en charge des personnes souffrant de handicaps, bien qu’elles soient incapables de s’habiller, de se laver, de manger ou d’aller aux toilettes elles-mêmes. Les détenus aveugles ne reçoivent pas de supports d’information en braille.

Les recommandations du Bureau de l’Ombudsman (MNP) relatives à ces questions ne sont pas entièrement mises en œuvre.