Argentine
Capitale — Buenos Aires
Population du pays
i2015Taux d'incarcération (pour 100 000 habi…
i2014/ SNEEPNature du régime
Indice de développement humain
i2016/ PNUDMinistère(s) en charge de l'administrat…
Nombre de personnes incarcérées
i2014/ SNEEPTaux d'occupation
i2014/ SNEEPNombre d'établissements
i2015/ Observatoire international des prisons (OIP) Section ArgentineUn MNP est créé
Ouicréé en 2014
Femmes incarcérées
i2014/ SNEEPMineurs incarcérés
i2014/ SNEEPPourcentage de personnes en détention p…
i2014/ SNEEPLa peine de mort est abolie
Ouidepuis 2008
Le quotidien
La loi exige que les cellules individuelles mesurent au moins 3x3m2. En réalité, chaque cellule est équipée de trois lits. Les draps et couvertures sont à la charge de la personne détenue. En cas de vols, le personnel pénitentiaire n’intervient pas.
Les détenus ont marginalement accès à l’eau chaude. Les évacuations sont déficientes et les établissements ont tendance à être inondés lorsqu´il pleut.
L’état des infrastructures d´une prison varie selon son époque de construction – la majorité de celles construites au XIXème siècle sont en mauvais état – et le type de régime : fédéral, de Buenos Aires ou provinciale.
Les conditions de détention dans les prisons de Buenos Aires sont souvent plus difficiles que dans les prisons fédérales. L’établissement pénitentiaire de Devoto dispose uniquement d´une douche pour cent personnes et les connexions électriques ne sont pas protégées. Il est prévu de fermer cet établissement mais le projet est toujours en attente. Le centre de province Unité 1 de Corrientes est lui aussi connu pour ses conditions difficiles.
Le centre pour mineurs Michel Torino manque de radiateurs. De l´humidité, des infiltrations d’eau, des installations électriques dangereuses sont dénoncées. Des douches sont partiellement fermées depuis plusieurs mois. Deux seulement disposent d´eau chaude.
La nourriture ne répond pas aux standards de qualité. Dans certains établissements, les personnes détenues qui font preuve de bonne conduite ou qui ont des connaissances culinaires peuvent cuisiner sous la supervision du personnel. Ce service peut également être assuré par une entreprise privée. Dans les deux cas, l´approvisionnement en nourriture est faible et les détenus dépendent beaucoup de l´aide familiale.
La loi requiert qu’un nutritionniste élabore les menus des adultes et des mineurs mais cela n´est pas respecté. Les adolescents se plaignent de la taille des rations et du peu de temps qu’ils ont pour manger. Les collations prévues ne sont pas distribuées quotidiennement et les aliments arrivent avec du retard, dans des véhicules non adaptés.
Les produits d’hygiène sont rares. De nombreux détenus dépendent de leurs familles ou de leurs amis pour ces fournitures.Les détenus qui disposent de la confiance du personnel peuvent entretenir les parties communes, ramasser les déchets et laver les couloirs. L´insalubrité et les invasions de blattes, rats, mouches et moustiques augmentent le risque de contracter la dengue, le zika ou le chikungunya.
Les poubelles sont jetées dans un tambour commun et, selon l´établissement, sont évacuées une fois par jour ou moins. Elles sont déversées directement dans le camion, ce qui favorise la contamination et la prolifération de germes.
Le système de santé dépend du service pénitentiaire et non du ministère de la Santé. Le personnel médical répond aux instructions du directeur de l’établissement. Son indépendance s’en trouve compromise, notamment lorsqu´il s´agit de constater des mauvais traitements ou des tortures. Un infirmier ou un médecin est présent pendant la journée, dans la majorité des établissements, Il peut traiter les blessures légères ou demander qu’un patient soit transporté à l’hôpital. Un psychiatre est également présent quelques jours par semaine ; s’il est nécessaire, l’infirmier ou le médecin de service peut le consulter par téléphone.
Un rapport de la Defensoría de Casación de la province de Buenos Aires révèle que plus de 200 plaintes ont été déposées contre les établissements pénitentiaires suite à des soins médicaux déficients. Des problèmes ophtalmologiques, pulmonaires et psychologiques (dus à l´isolement) sont relevés, ainsi que des cas de convulsions, de tuberculose et de fièvre. Le manque de médicaments ou la distribution de médicaments périmés sont dénoncés depuis des décennies.
L’État prend à sa charge le coût des hospitalisations. Les médicaments essentiels de base sont également gratuits, mais les médicaments spécifiques sont à la charge de la personne détenue ou de sa famille. Il est possible de solliciter le ministère de l´Action sociale (prisons fédérales) ou le ministère de la Santé de la province (prisons de province) pour le paiement. Les personnes atteintes du Sida font régulièrement appel à eux.
Les personnes toxicomanes souhaitant entamer un programme de soin ne reçoivent pas l’attention adéquate. Le personnel pénitentiaire est habilité à organiser des groupes de soutien après avoir suivi trois mois de cours. L’OIP estime que ce temps de formation est insuffisant.
L’administration pénitentiaire fait cohabiter les personnes toxicomanes et les personnes souffrant de maladies mentales. Les dépressions sont récurrentes et peu prises en charge; les consultations avec des psychologues ou des psychiatres sont brèves et il n’y a pas de véritables programmes de soutien.
La qualité et la fréquence des activités dépendent de la province ou des établissements pénitentiaires fédéraux. Le système pénal de Buenos Aires (SPB) organise régulièrement des championnats de football inter-centres et propose des ateliers de littérature, de journalisme ou de lecture. Les aumôniers organisent des lectures bibliques.
Les bibliothèques sont peu nombreuses et la majorité fonctionne grâce à des donations. De nombreux détenus laissent leurs livres à disposition à leur sortie. Tous n´ont pas accès aux bibliothèques ou aux salles d´étude.
Ces activités sont destinées à des petits groupes et doivent être autorisées par l´administration pénitentiaire, qui les interdit régulièrement pour des « raisons de sécurité ».
Selon le dernier rapport du Système national de statistiques sur l´exécution des peines (SNEEP) de 2014, 59% des détenus (37 929) au niveau national n’a pas de travail rémunéré. Ce pourcentage reste stable au cours des cinq dernières années. Parmi ceux qui travaillent (26 572 détenus), 15% effectuent jusqu´à 40 heures par semaine.
Les types de travail proposés sont : agriculture ou fourrage, production de meubles ou d’articles de sport, nettoyage et entretien des bâtiments. La Cour de cassation déclare en 2014 que les travaux réalisés pour les entreprises privées doivent être rémunérés au salaire minimum de 22 pesos/heure (1.57 USD) pour 200 heures mensuelles. Le détenu ne dispose pas de la totalité de la somme ; un tiers est destiné au dédommagement de la victime, un tiers est disponible pour ses dépenses personnelles et un tiers lui sera remis à sa libération. Si l´employeur est l´État, il arrive que le travail ne soit pas rémunéré, celui-ci étant considéré comme une rétribution à la société.
Les personnes détenues qui travaillent ont la possibilité de se syndiquer. Le Syndicat unique des travailleurs privés de liberté (SUTPLA) dispose de représentants dans quatre prisons fédérales : les complexes pénitentiaires I et IV de Ezeiza, l´Unité Nº4 de Santa Rosa et le Complexe II de Marcos Paz. Dl Une section existe aussi dans le centre pénitentiaire de Viedma, dépendant du service de Rio Negro.
L´éducation primaire est obligatoire pour ceux qui ne l´ont pas terminée. Les prisonniers peuvent poursuivre des études secondaires ou universitaires mais l´administration pénitentiaire ne les y encourage pas. Le temps d´étude est considéré comme un temps de récréation et la cour de promenade leur est alors inaccessible.
Selon le rapport de 2014 du SNEEP, 48% des détenus au niveau national (32 900) ne participent à aucun programme éducatif. Au sein du Système pénitentiaire fédéral (SPF), 14% (1300) y participent. Parmi eux, 1,6% (1 139) réalisent des études supérieures.
Le SPF a tenté, à plusieurs reprises, de fermer le Centre universitaire de Devoto (CUD), rattaché à l´Université de Buenos Aires, en raison de difficultés d’y imposer ses règles de sécurité.
Les enseignants intervenant dans les établissements pénitentiaires doivent posséder, outre leur diplôme habituel, une certification de formation spéciale. La formation est différente pour les enseignants intervenant auprès de mineurs ou auprès de majeurs.
Les personnes détenues peuvent pratiquer librement la religion de leur choix. Les plus représentées sont les religions évangélique, catholique et la Umbanda (ou Quimbanda afro-brésilienne).
La religion évangélique est la plus importante de toutes. Les pasteurs sont présents en très grand nombre. Des groupes évangéliques prennent le contrôle d´un quartier de certains établissements et exigent des codétenus qui souhaitent bénéficier de leur protection de se convertir. Le phénomène est courant dans les prisons de Buenos Aires et à la prison de Magdalena.
Tous les établissements disposent d´une chapelle pour l’exercice du culte catholique mais peu de prêtres sont présents. Les aumôniers reçoivent un salaire.
Les institutions des droits de l´homme et les organisations de la société civile légalement reconnues peuvent, en théorie, accéder aux établissements après avoir effectué une demande.
La section argentine de l´OIP a été interdite d´accès dans les prisons fédérales pendant le mandat de Cristina Fernández. Le prétexte a été que l´organisation n´était plus active depuis 1999, alors qu´elle avait fait preuve d’activité six mois auparavant. L’OIP a continué son travail malgré tout et a pu contrôler les votes au sein des établissements pénitentiaires fédéraux grâce à une disposition de la Chambre fédérale électorale.
L´accès aux prisons provinciales n’a jamais était restreint.
Les détenus peuvent disposer d´un compte épargne, administré par une personne de confiance (membre de la famille, avocat ou ami), sur lequel ils peuvent verser la part de rémunération perçue pour leur travail.. Leurs économies ne peuvent être utilisées que pour couvrir leurs dépenses personnelles basiques.Les détenus en situation d’indigence ne bénéficient d’une aide des services sociaux que très rarement. Les organisations humanitaires prennent le relais en fonction de leurs possibilités. Il est possible d´acquérir des produits de consommation courante au sein des établissements. Leurs prix sont supérieurs à ceux du marché.
Certains établissements pénitentiaires permettent aux détenus de créer et d’animer une radio ou de confectionner un journal : une opportunité pour les prisonniers d´exprimer leurs idées, de diffuser leurs écrits, voire d´apprendre un métier.
Le Syndicat unique des travailleurs privés de liberté (SUTPLA) n´a pas de personnalité juridique mais fait partie de l´Association des travailleurs de l´Etat (ATE).
Les personnes en détention provisoire peuvent, depuis 2006, exercer leur droit de vote (avec la modification de la loi héritée de la dictature interdisant le vote à l´ensemble des prisonniers). Les jeunes gens âgés de 16 à 18 ans disposent d’un droit de vote facultatif (le vote est obligatoire pour les majeurs).
La violence physique et les fouilles des cellules sont utilisés comme une forme de sanction. Quand des armes ou des objets tranchants sont trouvés, les détenus sont placés en isolement.
Les détenus sont fouillés lorsqu´ils entrent et quittent les parloirs ou lorsqu´ils vont dans des lieux de rassemblement, comme le terrain de football. La Loi d´Exécution Nº 24.660 indique que les fouilles corporelles doivent respecter la dignité humaine et que « la fouille manuelle, dans la mesure du possible, sera substituée par des capteurs ou autres techniques non tactiles appropriées et efficaces » (art. 163). Selon le Bureau du défenseur de la Nation (PPN), aucun établissement n’a mis en place lesdits capteurs et les fouilles manuelles continuent d´être pratiquées.
La présence de stupéfiants à l´intérieur des établissements pénitentiaires, introduits clandestinement par les visiteurs ou des membres du personnel, est régulièrement constatée. Bien que doté d´un système de sécurité efficient, les évasions restent possible grâce à la complicité du personnel pénitentiaire.
Trois détenus condamnés à la prison à perpétuité pour trafic de stupéfiants s’échappent, le 27 décembre 2015, de la maison centrale General Alvear à Santa Fe. Ils auraient dû être placés sous surveillance spéciale et contrôlés par des caméras de sécurité (prétendues ne plus fonctionner plus depuis le mois d´octobre). Le Secrétariat de la police criminelle du ministère de la Justice de Buenos Aires est présumé avoir saisi les vidéos. Les évadés sont capturés trois jours après. Cette affaire bénéficie d’une large couverture médiatique : on soupçonne un réseau de complicité entre la police du SPB et certains secteurs politiques.