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L’intégrité physique

Abolie par une loi de 1981, la dernière exécution a eu lieu le 10 septembre 1977.

L’article 132-23 du Code Pénal définit la peine à perpétuité comme une période durant laquelle le condamné ne peut obtenir aucun aménagement de sa peine, c’est la période de sûreté.

Elle peut prendre deux formes :

  • La période de sûreté obligatoire

Pour un certain nombre d’infractions particulièrement graves et si la peine prononcée est au moins égale à 10 ans de peine privative de liberté sans sursis, la loi impose le prononcé d’une période de sûreté en complément de la peine principale. Cette période de sûreté est de la moitié de la peine ou de 18 ans en cas de condamnation à perpétuité.

La juridiction de jugement peut, toutefois, par décision spéciale prolonger la durée de cette période de sûreté, jusqu’au 2/3 de la peine ou jusqu’à 22 ans en cas de condamnation à perpétuité. Ou au contraire réduire la durée de cette période.

En cas d’assassinat d’un mineur de 15 ans commis avec viol, tortures ou actes de barbarie, la Cour d’Assises peut porter la période de sûreté à 30 ans ou, si la condamnation est la réclusion criminelle à perpétuité, faire recouvrir toute la peine par la période de sûreté (Article 221-3 du Code Pénal). C’est ce qu’on appelle la période de sûreté perpétuelle ou perpétuité incompressible.

  • La période de sûreté facultative

Dans tous les cas où la loi n’impose pas de période de sûreté, les juridictions qui condamnent à une peine privative de liberté de plus de 5 ans sans sursis, peuvent y ajouter une période de sûreté. La période de sûreté ne peut pas dépasser les 2/3 de la peine. En cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, la période de sûreté ne peut dépasser 22 ans.

Chaque année, près de 250 personnes décèdent en prison (243 en 2013, derniers chiffres publiés). Près de la moitié de ces décès sont imputables aux suicides : on se suicide sept fois plus en prison qu’à l’extérieur selon une étude de l’Institut national d’études démographiques (INED 2014). La violence et la maladie sont les autres causes principales, les homicides restent rares. L’administration pénitentiaire (AP) ne publie pas régulièrement de statistiques en matière de décès et de suicides en prison. Les derniers chiffres-clés portent sur l’année 2014. Ils ne mentionnent pas le nombre total des décès en prison : les décès qui surviennent après une levée d’écrou ne sont pas comptabilisés. 1 033 tentatives de suicide et 110 suicides sont déclarés par l’AP en 2014, dont 16 de personnes placées sous surveillance électronique hors détention. Le taux de suicide est de 13,9/10 000 personnes détenues. Le quotidien Le Monde donne, le 20 avril 2016 et pour l’année 2015, le chiffre de 113 suicides.

Certains facteurs comme l’entrée en détention, la détention provisoire, le placement en cellule disciplinaire et la rupture des liens familiaux multiplient le risque de suicide. Les politiques de prévention se succèdent mais ne parviennent pas à faire diminuer le taux de manière significative : la France reste le 7ème pays du Conseil de l’Europe où l’on se suicide le plus en prison.

Un collectif d’association recense tous les ans un certain nombre de décès en détention et organise un hommage aux morts de la prison.

Le 4 février 2016, la France est condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Isenc c. France pour violation de l’article 2 (droit à la vie) de la Convention européenne des droits de l’homme. En 2008, un homme placé en détention provisoire depuis douze jours est signalé par le juge d’instruction aux autorités pénitentiaires comme “fragile” et nécessitant une surveillance particulière. Il se pend, profitant de l’absence de ses deux co-détenus dans la cellule. La cour constate que les mesures prises par l’administration pénitentiaire (placement de l’intéressé en cellule collective; ronde de surveillance chaque heure…) n’ont été ni adaptées ni suffisantes. Les autorités étatiques ont donc manqué à leur obligation positive de protéger la vie de M. Isenc. La Cour précise “qu’il ne saurait être question de réduire la prise en charge d’une personne détenue en détresse aux seules mesures de surveillance”.

Le 12 avril, la Voix du Nord relate le suicide d’un sexagénaire retrouvé pendu dans sa cellule alors qu’il était placé au quartier des arrivants et sous surveillance spéciale, au regard du risque suicidaire détecté. Les rondes effectuées toutes les heures n’ont pas permis d’éviter ce suicide.

Le procureur d’Évry décide d’ouvrir une information judiciaire pour “homicide involontaire”, le 18 avril 2016, après le décès, le 1er avril 2016, d’un homme de 31 ans qui avait mis le feu à son matelas dans sa cellule de la prison de Fleury-Mérogis. Le procureur affirme considérer que “un certain nombre d’éléments [lui] laissent à penser que des fautes ont été commises”.

Nombre de décès

242

i
01/01/2013
/ Direction de l'administration pénitentiaire

Nombre de décès attribués à un suicide

0

i
01/12/2014
/ INED

Les cas de violence et de mauvais traitements font partie du quotidien de la détention. Ils peuvent prendre plusieurs formes : violences entre personnes détenues, violences émanant du personnel pénitentiaire ou dirigées contre le personnel, automutilations. Il peut s’agir de violences verbales (insultes, brimades, vexations) ou physiques. L’année 2016 est marquée par une évolution importante des pratiques en matière de fouille et de vidéosurveillance sur fond de focalisation du débat pénitentiaire sur la question de la radicalisation islamiste.

Chaque établissement est tenu de recenser quotidiennement chaque incident et de le classer par catégorie. L’administration pénitentiaire comptabilise, en 2014 (derniers chiffres publiés), 4 122 agressions physiques contre le personnel dont 149 ayant entraîné une interruption temporaire de travail; 8 061 agressions entre personnes détenues, 12 prises d’otages.

Le Comité pour la prévention de la torture (CPT) décrit ainsi, dans son rapport adopté à l’été 2016 que, malgré une baisse des violences depuis l’ouverture du centre pénitentiaire de Condé-sur-Sarthe, “les tensions entre détenus demeuraient importantes; les invectives et menaces étaient fréquentes, parfois suivies de coups. Beaucoup des détenus interrogés ont indiqué être en possession d’armes artisanales confectionnées pour « se défendre”. De plus, la direction a reconnu l’existence de rackets et de pressions sur les détenus les plus faibles, voire sur leurs familles. » Dans les maisons d’arrêt de Fresnes, de Nîmes et de Villepinte, le CPT fait état d’agressions verbales et physiques, conséquences de tensions dues à la surpopulation et au manque d’activité, ainsi que du fait que “des bagarres [ont] parfois lieu lors des promenades ou des douches collectives”.

Les violences exercées par des personnels contre des détenus ne font pas l’objet de publication. Elles donnent très rarement lieu à des poursuites disciplinaires ou judiciaires.

La section française de l’Observatoire international des prisons (OIP-SF) publie, le 4 avril 2016, un récit précis des exactions commises par les personnels du centre pénitentiaire de Remire-Montjoly en Guyane : “Le 11 mai 2015, la vidéosurveillance de l’établissement révèle les images d’un détenu frappé violemment par des surveillants et tiré ensuite par les cheveux pour être remonté sur une coursive. Le directeur dépose alors une plainte… qui sera classée sans suite par le parquet de Cayenne”.

Le CPT rapporte, à l’été 2016, au sujet de Fresnes que “*de nombreuses allégations crédibles d’insultes, notamment à caractère raciste, de comportements inadaptés (bousculades, rudoiement) et de recours excessif à la force ont été recueillies. Surtout, un nombre non négligeable de détenus se sont plaints d’avoir reçu des coups portés délibérément par des surveillants notamment alors qu’ils étaient immobilisés au sol, avec ou sans menottes. Des personnes travaillant dans l’établissement ont également corroboré les informations collectées. Ces incidents violents concernaient principalement des agents pénitentiaires, y compris des “gradés”, de la division III. La description d’un agent, qualifié par les détenus de “ lieutenant”, particulièrement méprisant à l’égard des détenus et ayant à l’occasion des accès de violence, a été entendue à plusieurs reprises par différents membres de la délégation*“.

La violence est exacerbée par la surpopulation et la promiscuité, les choix récents de conception des établissements (architecture, limitation des contacts entre surveillants et détenus, grande taille des prisons), les tensions dues à certaines sanctions disciplinaires, les discriminations, les fouilles à nu.

Ainsi, un homme est condamné à quatre mois de prison supplémentaires, en février 2016, pour avoir mis le feu à sa cellule en juin 2013 il témoigne : “Les toilettes étaient brisées. Il y avait des excréments sur les murs et 30 centimètres d’eau sur le sol. (…) Je suis resté dix jours dans ces conditions. La dignité humaine on la met où ?”.

Les prises d’otage résultent généralement de l’exaspération de personnes détenues dont les peines sont longues et qui ne sont pas entendues dans les vœux qu’elles expriment.

En février 2016, un homme est condamné à six ans de prison supplémentaires pour avoir pris en otage le directeur adjoint de la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais), en septembre 2015, finalement libéré “sain et sauf” selon les syndicats après avoir été retenu pendant plus de trois heures. L’auteur de la prise d’otage purge une peine de 28 ans de prison et a déjà fréquenté plus de 80 établissements. Il demandait à être transféré en Guadeloupe dont il est originaire et avait déjà effectué des prises d’otage à Arles et Condé-sur-Sarthes pour des raisons similaires. Le 2 mai 2016, trois détenus retiennent durant trois heures un surveillant jusqu’à l’intervention du RAID; ils demandaient leur transfert.

La violence touche également les surveillants, habituellement sur les coursives (6 prises d’otage et 49 agressions graves en 2015).

Au début de l’année 2016, une voiture tente d’écraser deux surveillantes devant la prison de Meaux, l’une d’elle ayant été grièvement blessée à cette occasion.

Le régime des fouilles à nu subit un important recul au cours de l’année 2016. Alors que les fouilles à nu avaient été encadrées par la loi pénitentiaire de 2009, le Garde des Sceaux cède à la pression de syndicats de surveillants pénitentiaire en introduisant un amendement dans le projet de loi antiterrorisme : les fouilles à nu peuvent maintenant être décidées à la suite de consignes générales qui fixent les lieux et les périodes où elles peuvent être opérées, indépendamment des critères liés à la personne détenue elle-même. Ce recul est dénoncé par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) . Elle adresse, chose rare, un courrier au président de la commission mixte paritaire du parlement qui devait rédiger la version finale de la loi. La France est condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), en 2011, pour les fouilles réalisées de manière systématique sur une personne détenue

Des détentions arbitraires sont exceptionnellement signalées lorsque les dysfonctionnements du greffe entraînent le maintien en détention d’une personne qui devrait être libérée.

Au cours de l’année 2016, plusieurs personnes détenues ont dû être libérées faute d’avoir été présentées au tribunal dans les délais prévus : leur détention serait sinon devenue arbitraire. Cette situation est causée par des problèmes récurrents concernant le transfert des extractions judiciaires à l’administration pénitentiaire.