Sécurité, ordre et discipline

Les fonctions de sécurité sont dévolues à

l’administration pénitentiaire

Le parc pénitentiaire dispose d’établissements, de quartiers ou de cellules dotés de dispositifs sécuritaires renforcés

oui

La Loi de principes (section III) prévoit la possibilité de placement sous un régime de sécurité particulier individuel (RSPI). Ce placement “peut uniquement être décidé lorsque la sécurité ne peut être préservée d’aucune autre manière et pour la durée strictement nécessaire à cet effet” (article 116). Une personne détenue peut être placée sous RSPI si elle “représente une menace constante pour la sécurité et s’il est apparu que tant les mesures de contrôle que les mesures de sécurité particulières sont insuffisantes”. Le placement se fait alors dans des “cellules de sécurité”.1 Les mesures suivantes peuvent être appliquées : interdiction de prendre part à des activités communes, contrôle systématique de la correspondance, mise en place de dispositifs de séparation lors des parloirs, privation partielle de l’usage du téléphone, fouille systématique des vêtements (article 117).

La prison de Bruges comptait, jusqu’en 2019, un quartier de très haute sécurité de dix places. Les personnes détenues considérées particulièrement violentes envers les agents ou présentant un fort risque d’évasion y étaient placées. Elles étaient soumises à un régime extrêmement strict et surveillé. Il est désormais possible que les personnes soumises à des régimes plus stricts soient placées au sein de quartiers habituels.

Les prisons de Hasselt et de Ittre comptent deux sections de 20 places aménagées pour accueillir certains détenus identifiés “radicalisés”. Ces sections sont appelées “D-Radex”. Seuls certains détenus, sur décision de la direction, ont accès à une activité. Le travail y est très limité, ainsi que les visites et l’accès au téléphone. À Ittre, le préau (cours de promenade) de la section “D-Radex” est minuscule et grillagé. Aucun programme de “déradicalisation” y est associé. À Hasselt, les détenus ont accès au préau ordinaire et peuvent recevoir la visite d’un spécialiste du “désengagement”.

Le tribunal correctionnel de Bruxelles condamne, en 2019, l’État belge à verser la somme symbolique d’un euro par jour de détention aux détenus placés en section “D-Radex”. L’État belge considère qu’il s’agit d’un régime de droit commun, alors que le tribunal l’assimile à un régime de sécurité particulier individuel (RSPI). Le régime RSPI, prévu par la loi, est accompagné d’une série de garanties législatives (Code civil, article 1382). Le tribunal correctionnel de Bruxelles considère que le placement en section “D-Radex” sans application des garanties prévues constitue une faute de l’État belge. L’un des avocats des plaignants, Nicolas Cohen2, rappelle l’importance de l’individualisation du suivi des détenus et de la garantie du droit de recours prévu par la loi.


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 7-11. 

  2. membre du conseil d’administration de Prison Insider 

Les personnes détenues sont classées selon leur niveau supposé de dangerosité

oui

Les détenus jugés dangereux sont identifiés dans une liste que l’administration ne rend pas publique. Les détenus concernés n’ont pas accès à leur dossier de classification et ne peuvent contester la décision. Des observateurs signalent que les transferts liés à leur classification mettent à mal tout projet de détention et de réinsertion. Il n’existe aucune possibilité de faire appel d’une décision relative à l’imposition d’une mesure de sécurité particulière (MSP) ou au placement sous un régime particulier individuel (RSPI).1


  1. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradants, “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 27 mars au 6 avril 2017”, 8 mars 2018, p. 28. 

La Loi de principes dispose que “le maintien de l’ordre et de la sécurité implique une interaction dynamique entre le personnel pénitentiaire et les détenus, d’une part, et un équilibre entre les moyens techniques mis en œuvre et un régime de détention constructif, d’autre part” (article 105). La Loi pénitentiaire du 23 mars de 2019 prévoit deux rôles distincts pour le personnel de surveillance : le contrôle et l’accompagnement des personnes détenues.

Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT), lors de sa visite en 2021, souligne la volonté de l’administration pénitentiaire de scinder le personnel en deux catégories (40 % sécurité et 60 % éducation). Une formation spécifique serait prévue pour chaque catégorie et le personnel invité à choisir à quelle catégorie il souhaite appartenir. Le CPT précise que les autorités souhaitent mettre en œuvre cette approche progressivement. Elle sera appliquée pour la première fois à la prison de Haren.1


  1. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradants, “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 2 au 9 novembre 2021”, 29 novembre 2022, p. 25. 

Les modalités et procédures des fouilles sont définies dans la Loi de principes (article 108), ainsi que par les lettres collectives (circulaires) n° 141 du 30 janvier 2017 et n° 156 du 14 août 2020.

  • fouille des vêtements (ou fouille sommaire) : cette fouille a pour objectif de vérifier si la personne détenue est en possession de substances ou d’objets interdits ou dangereux. Elle peut être soumise à une fouille de ses vêtements par des membres du personnel de surveillance lorsque cela “est nécessaire dans l’intérêt du maintien de l’ordre ou de la sécurité”. Quelques commissions mentionnent des plaintes relatives au manque d’intimité lors des fouilles sommaires, ainsi que des attouchements désagréables et d’autres gestes déplacés de la part des agents.1

  • fouille à corps (ou fouille à nu) : la personne détenue est obligée de se déshabiller. Un agent pénitentiaire inspecte l’extérieur du corps et observe les cavités corporelles. La personne est fouillée à corps quand la direction estime que la fouille des vêtements n’est pas suffisante. La direction doit remettre sa décision par écrit à la personne détenue, au plus tard 24 heures après que la fouille ait eu lieu.

La Cour constitutionnelle interdit, en 2014, les fouilles à corps systématiques et non justifiées. Elle estime qu’une évaluation des risques est nécessaire pour que la fouille soit conforme au principe de stricte nécessité et de traitement humain. Les fouilles à corps systématiques sont pourtant encore pratiquées en vertu de la Loi de principes et de la lettre collective n° 141 du 30 janvier 2017. Il y est prévu une fouille à corps systématique pour toutes les personnes détenues à leur entrée dans la prison, avant un placement en cellule de sécurité ou en cellule de punition (cellule disciplinaire, aussi appelée cachot), et après les visites réalisées sans dispositif de séparation.

Le Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP) signale le manque persistant de transparence des décisions de la direction. À Merksplas, la décision est mentionnée au verso du formulaire de rapport et, parfois, il n’est pas mentionné qui a pris la décision ni pour quelles raisons.2 Les fouilles à corps font souvent l’objet de plaintes de la part des personnes détenues. Ces dernières contestent le non-respect des procédures et l’absence de serviette pour préserver l’intimité. Certaines mentionnent également que des fouilles sont pratiquées à main nue, dans des espaces avec beaucoup de passage, et que des flexions sont imposées. Le CCSP constate que la fouille à corps est souvent vécue comme un moment humiliant.3


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Rapport annuel 2020”, 2021, pp. 37 et 50. 

  2. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Rapport annuel 2021”, 2022, p. 27. 

  3. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Rapport annuel 2020”, 2021, pp. 37 et 50. 

  • Les personnes détenues à la prison de Marneffe témoignent au CCSP que les agents leur font soulever leurs parties génitales après qu’elles se sont déshabillées pour une fouille à nu.

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    16/03/2023
    / Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP), Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP), "Visite des établissements pénitentiaires de Louvain Central et de Marneffe”, p. 67

Toutes les fouilles sont consignées sur un registre

non

Les fouilles à nu doivent faire l’objet d’un registre. Le Médiateur constate, en 2019, que ces fouilles ne sont parfois pas enregistrées dans le dossier de la personne détenue.1


  1. Le Médiateur fédéral, “Fouilles à nu”, 2019. 

  • Le CCSP constate, en 2022, à la prison de Saint-Hubert, qu’il n’existe toujours pas de registre de fouilles. Ce document est obligatoire. Les informations doivent, dans cette situation, être extraites des dossiers individuels.

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    15/05/2023
    / Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP)

L’examen des cavités corporelles est effectué par un médecin

oui

L’observation des cavités corporelles lors des fouilles à corps est réalisée par un agent pénitentiaire. Celui-ci n’est pas autorisé à toucher la personne détenue. Seul un médecin est habilité à effectuer un examen des cavités corporelles, et pour des raisons strictement médicales.
Le Médiateur fédéral constate, en 2019, que le personnel médical a subi des pressions de la part des membres du personnel de surveillance pour participer à une fouille à nu dans cinq établissements. Le personnel infirmier déclare également être régulièrement sollicité pour fouiller à nu des détenus malades, plâtrés ou à mobilité réduite. Le Médiateur indique que plusieurs médecins exerçant en prison ne sont pas assez informés du cadre légal encadrant leurs compétences.1


  1. Le Médiateur fédéral, “Fouilles à nu”, 2019, pp. 115-117. 

Les proches sont soumis, à leur entrée en prison, à un contrôle par

appareil électronique ou fouille par palpation (fouille des vêtements)

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Loi de principes, article 61

Les professionnels sont soumis, à leur entrée en prison, à un contrôle par

appareil électronique

La circulaire ministérielle n° 1810 établit que les moyens de contraintes autorisés au sein des prisons sont les menottes et les entraves métalliques pour les pieds, dotées d’une charnière à double verrouillage. Ces moyens de contrainte peuvent être utilisés lorsqu’une personne détenue présente un danger pour son intégrité physique ou celle d’autrui.1

Le CPT constate, en 2017, l’utilisation par des agents pénitentiaires de la contention mécanique en cas de crise psychique de détenus, en dehors de toute structure médicalisée et sans la présence de personnel de santé. Un détenu incarcéré à la prison de Leuze-en-Hainaut aurait été maintenu pendant 18 heures sous contention complète à l’aide de menottes, après avoir menacé de se suicider.2

La contention chimique (halopéridol ou zuclopenthixol) est parfois appliquée à l’égard des personnes détenues sous contention mécanique. Le CPT note que c’est notamment le cas à la prison de Lantin. Le recours à la contention chimique ne se fait que sur ordre d’un médecin et en sa présence.3

La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) souligne, dans l’arrêt Tekin c. Belgique de 2017 l’insuffisance et l’imprécision du cadre juridique et administratif qui prévoit le recours aux mesures de coercition. Elle relaye les préoccupations des observateurs internationaux.


  1. ministère de la Justice, OIP Belgique, “Notice 2016 pour le droit à la dignité des personnes détenues”, 2016, p. 58. 

  2. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradants, “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 27 mars au 6 avril 2017”, 8 mars 2018, p. 41. 

  3. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradant, “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 2 au 9 novembre 2021”, 29 novembre 2022, p. 23. 

Le recours aux menottes et aux entraves métalliques pour les pieds est soumis à la décision de la direction et doit toujours être notifié dans le registre spécial dédié aux mesures coercitives. Les circonstances qui ont motivé le recours, l’heure et la durée de l’intervention doivent y être consignées.1


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 42-43. 

Le personnel de surveillance dispose

d’armes non-létales

Les agents peuvent se servir de matraques, de boucliers, de vêtements de protection et de casques (circulaire ministérielle n° 1810).1


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 42-43. 

Un corps d'intervention spécialisé est constitué pour le maintien de l’ordre

oui

Chaque prison dispose d’un corps d’intervention spécialisé notamment pour les mises au cachot (cellules de punition). La direction fait appel à la police en cas de mouvements collectifs tels que des émeutes, ou en cas de non-réintégration en cellule après les temps de promenade et de prière collective au préau (cour de promenade).

Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) indique que les personnes détenues considérées comme radicalisées font l’objet d’une surveillance accrue. Une majorité d’entre elles fait l’objet d’une mesure de sécurité particulière (MSP) ou est soumise à un régime de sécurité particulier individuel (RSPI).1 Voir section Sécurité, ordre et discipline.

Des améliorations dans le traitement des personnes détenues dites radicalisées sont constatées, selon la Ligue des droits humains. L’isolement systématique est arrêté. Le droit de plainte est introduit. L’État belge est condamnée pour avoir placé, sans recours, les personnes dites radicalisées, dans des sections dédiées (les quartiers “D-RadEx”).2

L’administration surveille l’extrémisme politique et religieux. Elle se concentre principalement sur l’extrémisme islamique. Des politiques seraient en cours de généralisation afin de s’adapter au nombre croissant de cas d’extrémisme de droit.

L’administration suivait, au 11 janvier 2021, 100 personnes détenues considérées radicalisées : 45 en Wallonie, 43 en Flandre et 12 à Bruxelles. Leur prise en charge est axée sur la surveillance. L’administration indique s’orienter vers des mesures de désengagement (renoncement à la violence) plutôt que de déradicalisation (modification de la conviction et de la façon de penser). L’administration travaille également avec des aumôniers musulmans et avec des associations3 pour la mise en place de ces mesures.


  1. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 27 mars au 6 avril 2017”, 8 mars 2018, p. 29. 

  2. Ligue des droits humains, “État des Droits Humains en Belgique - Rapport 2021”, janvier 2022, pp. 26-27. 

  3. Le Centre d’aide et de prise en charge de toute personne concernée par les extrémismes et radicalismes violents (CAPREV) en Wallonie-Bruxelles, et le “Centrum Algemeen Welzijswerk” (CAW) en Flandres. 

Nombre d’évasions

8

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2021
/ Conseil de l’Europe, SPACE I - Rapport 2021, 19 avril 2022, p. 119, table 29.

L’évasion n’est pas sanctionnée pénalement : seules les infractions éventuellement commises à cette occasion peuvent être punies (menaces, violence, destruction). La non-réintégration de l’établissement après une permission de sortir ou un congé est comptabilisée comme une évasion.

Nombre de prises d'otage

Non communiqué

Nombre d’agressions envers les personnels

Non communiqué

Les mouvements collectifs sont recensés

-

Certaines prisons connaissent des mouvements collectifs de protestation. Ils s’expriment souvent par le refus des personnes détenues de rentrer en cellule à l’issue d’un préau (cour de promenade).

Les infractions à la discipline sont définies par les textes

oui

Les infractions disciplinaires sont définies dans la loi de principes (articles 129 et 130). Elles sont classées en deux catégories. Les infractions disciplinaires de la première catégorie sont les suivantes :

  • atteinte intentionnelle à l’intégrité physique de personnes ou menace d’une telle atteinte
  • dégradation ou destruction intentionnelle de biens meubles ou immeubles d’autrui, ou menace de tels actes
  • soustraction illicite de biens
  • atteinte intentionnelle à l’ordre
  • incitation à des actions collectives mettant sérieusement en péril la sécurité ou l’ordre dans la prison, ou conduite de telles actions
  • possession ou trafic de substances ou d’objets interdits par ou en vertu de la loi
  • évasion ou participation à celle-ci
  • possession ou utilisation de moyens technologiques qui permettent de communiquer de manière irrégulière avec le monde extérieur.

Les infractions disciplinaires de la seconde catégorie sont les suivantes :

  • profération d’injures à l’égard de personnes se trouvant dans la prison
  • non-respect des dispositions prévues par le règlement d’ordre intérieur
  • refus d’obtempérer aux injonctions et aux ordres du personnel de la prison
  • présence non autorisée dans un espace en dehors du délai admis ou dans un espace pour lequel aucun droit d’accès n’a été accordé
  • contacts non réglementaires avec un codétenu ou avec une personne étrangère à la prison
  • fait de ne pas maintenir l’espace de séjour et des espaces communs en état suffisant de propreté, ou de souiller des terrains
  • fait d’occasionner des nuisances sonores qui entravent le bon déroulement des activités de la prison.
  • Le CCSP remet en cause la légalité des systèmes disciplinaires en vigueur dans les prisons de Louvain Central et de Marneffe. Elles ne sont fondées ni sur les dispositions de la loi de principes, ni sur celles du règlement intérieur. Ces mesures supplémentaires sont systématiquement appliquées sans décision individuelle et motivée du directeur.

    Il s’agit, à Louvain, d’un système de points attribués aux détenus en fonction de l’infraction disciplinaire commise. La personne est transférée du régime ouvert au régime de base lorsqu’elle totalise dix points. Une sanction disciplinaire affecte, à Marneffe, le maintien dans ou l’accès à une cellule individuelle.

    i
    16/03/2023
    / Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP)

Les sanctions disciplinaires générales, quelle que soit la nature de l’infraction, sont les suivantes (Loi de principes, articles 132 et 133) :

  • réprimande avec inscription dans le registre des sanctions disciplinaires
  • restriction ou privation, pour une durée maximale de 30 jours, du droit de cantiner certains objets (à l’exception des articles de toilette et du nécessaire pour la correspondance)
  • isolement, dans l’espace de séjour attribué à la personne détenue (30 jours maximum en cas d’infraction de la première catégorie et 15 jours maximum en cas d’infraction de la seconde catégorie)
  • enfermement en cellule de punition (neuf jours maximum en cas d’infraction de la première catégorie et trois jours maximum en cas d’infraction de la seconde catégorie)

Des sanctions particulières sont prévues, dont la durée varie selon le type de sanction. Elles peuvent être infligées pour une durée maximale de 30 jours pour les personnes ayant commis une infraction de la première catégorie et de 15 jours au maximum pour les infractions de la seconde catégorie. Ces sanctions particulières sont :

  • la privation du droit de posséder certains objets
  • la privation ou la restriction du droit d’utiliser les équipements de la bibliothèque, sans préjudice du droit d’obtenir des informations dans le cadre d’une formation ou du droit à vivre librement sa religion ou sa philosophie
  • la privation ou la restriction des contacts avec les visiteurs extérieurs à la prison (visite avec une paroi de séparation vitrée, par exemple)
  • la privation ou la restriction du droit de téléphoner
  • l’interdiction de participer à des activités culturelles, sportives ou de détente collectives
  • l’interdiction de participer au travail collectif
  • l’interdiction de participer aux activités de formation collectives.

La sanction disciplinaire la plus utilisée est la mise à l’isolement (de un à 30 jours maximum). Le placement en cellule de punition (cellule disciplinaire, aussi appelée cachot) est la sanction la plus sévère.

Le CCSP indique que des plaintes concernant certaines sanctions disciplinaires sont adressées aux commissions de surveillance. À Gand, la durée des sanctions disciplinaires n’est pas toujours claire et entraîne des frustrations. À Louvain Secondaire, la Commission de surveillance observe des sanctions disciplinaires peu motivées. La Commission de la prison de Forest (fermée depuis 2022) note qu’un isolement dans l’espace de séjour de sept jours ou plus mène au transfert vers la troisième aile de l’établissement. Cela a pour conséquence une perte du travail et un renvoi à la fin de la liste d’attente. La Commission de Nivelles observe la même situation.1


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Rapport annuel 2020”, 2021, p. 51. 

  • Le CCSP remet en cause la légalité des systèmes disciplinaires en vigueur dans les prisons de Louvain Central et de Marneffe. Elles ne sont fondées ni sur les dispositions de la loi de principes, ni sur celles du règlement intérieur. Ces mesures supplémentaires sont systématiquement appliquées sans décision individuelle et motivée du directeur.

    Il s’agit, à Louvain, d’un système de points attribués aux détenus en fonction de l’infraction disciplinaire commise. La personne est transférée du régime ouvert au régime de base lorsqu’elle totalise dix points. Une sanction disciplinaire affecte, à Marneffe, le maintien dans ou l’accès à une cellule individuelle.

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    16/03/2023
    / Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP)

Le prononcé d'une sanction disciplinaire fait l'objet d'un débat contradictoire

oui

Le membre du personnel qui constate ce qu’il estime pouvoir faire l’objet d’une sanction disciplinaire, ou à qui une infraction est communiquée, doit rédiger un rapport de discipline à l’attention de la direction de l’établissement. Cette dernière informe la personne détenue concernée des faits qui lui sont reprochés, dans une langue qu’elle peut comprendre ou avec l’aide d’un tiers. La personne détenue porte ses arguments de défense à la connaissance de la direction oralement ou, si elle le souhaite, par écrit. La direction peut entendre l’auteur du rapport disciplinaire et un ou plusieurs témoins en présence de la personne détenue. Une décision est prise dans les 24 heures qui suivent l’audition (Loi de principes, article 144).

La personne détenue peut être assistée d’un avocat

oui

Les personnes détenues ont le droit d’être assistées par un avocat pendant la procédure disciplinaire (Loi de principes, article 144).

La compétence d’imposer des sanctions disciplinaires appartient à la direction de l’établissement (Loi de principes, article 127).
Les sanctions disciplinaires peuvent être appliquées avec un sursis total ou partiel. En cas de non-respect des conditions liées au sursis, la direction peut décider la mise à exécution totale ou partielle de la sanction disciplinaire prononcée. Elle peut convertir une sanction disciplinaire en cours d’exécution en une sanction disciplinaire avec sursis. Elle peut également mettre prématurément un terme à la sanction disciplinaire en cours lorsqu’elle estime que l’objectif de la sanction est atteint avant la fin du délai d’exécution (Loi de principes, articles 143).

La personne détenue peut faire appel d’une sanction disciplinaire

oui
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Loi de principes, article 144

Les personnes détenues ont le droit de déposer une plainte auprès des commissions de plaintes contre toute décision prise à leur égard par la direction de la prison. Cela inclut les décisions imposant une sanction disciplinaire, mais aussi celles de ne pas remettre un courrier, de refuser une visite hors surveillance, d’interdire de téléphoner, d’ordonner une fouille à corps.

Les sanctions disciplinaires peuvent être collectives

non

Les sanctions disciplinaires n’ont pas d’incidence sur la durée de la peine. Elles peuvent, toutefois, avoir un impact sur les décisions du tribunal d’application de peines relatives à un aménagement de peine.

Le placement à l'isolement est utilisé à des fins de

  • sanction
  • protection de la personne
  • sécurité

Le placement à l’isolement peut se dérouler en cellule de sécurité, en cellule de punition ou au sein de l’espace de séjour de la personne détenue (Loi de principes, articles 110, 134 et 140).
L’isolement à des fins sécuritaires se déroule en cellule de sécurité. Il découle de l’une des mesures suivantes :

  • mesure provisoire dans l’attente d’une procédure disciplinaire
  • mesure de sécurité provisoire (MSP)
  • mesure de sécurité particulières individuelles (RSPI)

Le CCSP explique : “Les objectifs des MSP et des RSPI les plus souvent mentionnés par les membres de la direction interrogés sont donc la sécurité du détenu lui-même, des autres détenus et du personnel. Pour eux, neutraliser le détenu, rétablir l’ordre et supprimer les incitations sont également des objectifs importants”. Ces mesures peuvent être mises en place en cas, par exemple, d’agressions physiques ou verbales graves envers des codétenus et le personnel, de vandalisme, de nuisances, de consommation de drogues, de contrebande de substances ou de biens interdits.

Le CCSP rapporte, en 2021, les autorités pénitentiaires ont recours aux cellules de sécurité pour prévenir les tentatives de suicides ou à la suite de celles-ci, ainsi qu’en cas d’automutilation, de décompensation psychiatrique et pour les personnes agitées ou en attente d’une prise en charge médicale.1

L’isolement à des fins de sanction se déroule dans l’espace de séjour attribué à la personne détenue ou dans une cellule de punition.
Le CPT constate, en 2017, que des personnes en situation de crise psychique ont été placées dans des cellules d’isolement au sein de quartiers disciplinaires. Il rapporte qu’une personne en crise, détenue à la maison d’arrêt de Lantin, aurait été maintenue complétement nue pendant plusieurs jours en cellule de punition. Le CPT signale que ces pratiques représentent un risque d’atteinte à la dignité humaine des personnes souffrant de troubles psychiques.2

Le CCSP rapporte que la grande majorité des membres de la direction affirment recevoir occasionnellement des demandes d’isolement volontaire de la part de détenus. Les motifs sont divers : dispute avec le codétenu, recherche de calme et de tranquillité, risque de se faire du mal, moyen de faire pression sur l’administration pour obtenir quelque chose (accélérer ou empêcher un transfèrement, par exemple). L’isolement volontaire n’a pas de base légale. Certaines directions craignent qu’en cas de refus, les personnes détenues provoquent volontairement une sanction disciplinaire pour obtenir le placement en isolement. Les directions disent tenter d’abord d’engager une discussion et de trouver une solution alternative (médiation avec le codétenu, changement de cellule). Les demandes d’isolement volontaire liées à un “besoin de calme” sont acceptées dans de nombreux établissements, notamment lorsqu’il s’agit de personnes atteintes de troubles psychiques pour lesquels un (bref) isolement pourrait faire partie du traitement.3


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 93-98. 

  2. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradants, “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 27 mars au 6 avril 2017”, 8 mars 2018, p. 41. 

  3. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 103-105. 

  • Le rapport annuel du CCSP révèle, en 2022, que la seule manière pour certaines personnes détenues de se sentir en sécurité est de demander à être placé en cellule de punition. Le sentiment d’insécurité vient, la plupart du temps, du manque de compatibilité entre personnes détenues (langue, habitudes quotidiennes, différence de régime).

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    19/09/2023
    / Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP)

Le placement à l'isolement se fait sur

décision du directeur de l’établissement

  • Le rapport annuel du CCSP révèle, en 2022, que 190 dossiers sont ouverts concernant les recours contre la décision du directeur général de placer, renouveler ou maintenir une personne détenue sous RSPI, ou contre le placement ou le transfert vers une autre prison.

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    19/09/2023
    / Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP)

La durée du placement à l’isolement est limitée

oui

La loi de principes indique que le placement en cellule sécurisée peut durer jusqu’à sept jours (article 112).
Le placement en cellule de punition dure neuf jours maximum en cas d’infraction de la première catégorie, et trois jours en cas d’infraction de la seconde catégorie. Cette durée peut être de 14 jours en cas de prise d’otage (article 132). Voir Régime disciplinaire pour les types d’infraction.

Le renouvellement est possible

oui

La loi de principes indique (article 112) que le placement en cellule sécurisée peut être prolongée trois fois au maximum. La direction doit motiver sa décision et entendre la personne détenue.

Le placement à l'isolement fait l'objet d'un réexamen régulier

oui

La direction de l’établissement enregistre chaque semaine des informations sur l’évolution du placement. Elle transmet un rapport mensuel à la direction générale qui peut décider à tout moment de mettre fin à l’isolement ou de l’adapter.

La personne à l'isolement fait l'objet d'un suivi médical régulier

oui

La direction est tenue de veiller à ce que la personne placée en cellule de punition puisse faire appel à une aide psychosociale et médicale (Loi de principes, article 136). Le directeur et un médecin doivent rendre visite quotidiennement à la personne détenue. Ils doivent s’assurer de son état et de sa situation, et vérifier si celle-ci souhaite soumettre une plainte ou formuler des observations (article 137).

La plupart des directeurs d’établissement déclarent au CCSP que le suivi médical se fait quotidiennement. Une attention particulière est portée aux personnes détenues présentant des troubles particuliers (psychose, envies suicidaires). Le passage du médecin dépend de son emploi du temps et des impératifs au sein l’établissement. Quelques directeurs expliquent au CCSP que le médecin est présent en matinée dans l’établissement : le délai d’attente pour la visite médicale est ainsi plus long lorsque le détenu est placé en isolement dans l’après-midi.

Un psychiatre peut être appelé en cas de décompensation, de psychose ou d’état dépressif. Cela n’est pas systématique et se fait selon une évaluation de la situation. Les enquêtes du CCSP constatent que le contact avec le Service psychosocial (SPS) est possible mais dépend de la disponibilité du personnel.1


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021. 

La mesure de placement à l’isolement se déroule dans des cellules dédiées, appelées cellules de punition (ou cachot) et cellules de sécurité.

L’arrêté royal du 2 février 2019 indique que la cellule de punition doit disposer d’une surface au sol d’au moins 10 m2, d’une hauteur libre d’au moins 2,5 m, d’une largeur d’au moins 2 m et d’une fenêtre de 1 m2 permettant l’entrée de la lumière naturelle. La porte se ferme uniquement de l’extérieur. Elle est dotée d’un œilleton et d’une boîte d’échange.

Le CCSP observe qu’en pratique les directions d’établissements ne font pas toujours la différence entre cellule de punition et cellule de sécurité.1 C’est également le constat du CPT, lors de sa visite en 2021 : “La délégation a reçu des explications contradictoires de la part de la direction et du personnel des prisons visitées quant à savoir quelle était l’autorité en charge du placement en cellule d’isolement et de l’utilisation de moyens de contention (c’est-à-dire si c’était le médecin ou le personnel de garde non médical qui prenait la décision). En outre, comme dans les prisons visitées par le passé, la délégation a relevé une confusion entre les placements disciplinaires et les placements de sécurité, les deux se déroulant essentiellement dans les mêmes cellules (désignées par le personnel par le même mot, à savoir “cachot”)”. Il note aussi que la confusion est aggravée par le fait que le placement au cachot puisse être appliqué pour des personnes souffrant de troubles psychiques et placées dans les annexes psychiatriques.2

Chaque prison dispose, en général, d’une à dix cellules, dédiées aux mesures d’isolement. Quelques établissements en comptent davantage, le maximum observé étant 29. La prison de Dinant ne possède aucune cellule de punition ou de sécurité.

Le CCSP dédie, en 2021, un rapport à ces lieux d’isolement. Il constate que les conditions matérielles sont déplorables dans la plupart de ces cellules. Plusieurs d’entre elles sont petites et non conformes aux normes : les superficies varient entre 6 m2 et 13,5 m2, aménagements compris. La lumière, l’aération et la literie sont insuffisantes. Les cellules d’isolement sont dotées généralement d’une structure en béton (parfois en bois ou en acier), fixée au sol, destinée à accueillir un matelas. Celui-ci a une épaisseur qui varie entre 10 et 15 cm, généralement en bon état. Certaines cellules sont dépourvues de cette structure et le matelas est posé au sol. Plusieurs commissions de surveillance font état de matelas sales et usés, voire dégradés.

Quelques cellules de punition disposent d’objets et d’infrastructures supplémentaires : horloge, miroir sécurisé, détecteur de fumée, prises au mur, tableau noir (pour écrire à la craie).

Certaines cellules de sécurité sont équipées de mobiliers supplémentaires : seau, chaise, table, armoire, étagère, frigo, lavabo, miroir sécurisé. Le mobilier est généralement fixé au sol.

Les cellules de punition et de sécurité sont quasi systématiquement pourvues d’un WC. Dans beaucoup de cas, le mécanisme pour actionner la chasse est disponible en cellule. Le cas contraire, celui-ci est situé à l’extérieur de la cellule. Il est actionné à la demande du détenu ou lors du passage des agents. 3

Les commissions de surveillance constatent, dans l’ensemble de ces cellules, un certain nombre d’inscriptions et de messages laissés sur les murs par les personnes détenues. Elles précisent également que “des traces et coups sont également visibles, ainsi que du sang, des fluides corporels, des traces d’excréments et de nourriture”. Certaines commissions relèvent une odeur de renfermé et de moisi dans ces cellules, et dans une moindre mesure des odeurs corporelles, de désinfectant, de tabac, de toilettes, de plâtre ou d’égouts.1 4

Marc Nève, président du CCSP, signale : “Il y a quelques jours, lorsque nous sommes allés à la prison de Tongres, nous avons constaté qu’un détenu placé en cachot n’avait pas trouvé d’autre moyen pour se vêtir, que de s’enrouler le corps avec du papier toilette. C’est totalement inacceptable”.


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 66-67 et 69-90.  

  2. Comité européen pour la prévention de la torture des peines ou traitements inhumains ou dégradants, “Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique par le CPT du 2 au 9 novembre 2021”, 29 novembre 2022, p. 21. 

  3. Ibid. 

  4. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Rapport annuel 2021”, 2022, p. 26. 

Les personnes à l’isolement ont droit à au moins une heure par jour en plein air (Loi de principes, article 136). Elles ont accès à un préau individuel. Il s’agit petite cour sombre, grillagée sur le dessus, avec une superficie qui varie entre 5,5 m2 et 25 m2. Les commissions de surveillance indiquent que, dans la plupart des cas, l’accès au préau se fait à la demande de la personne détenue isolée. Plus rarement, une sortie au préau est systématiquement prévue. La sortie a souvent lieu très tôt dans la matinée, par exemple à 6h du matin.1


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 127-130. 

Les personnes à l’isolement sont privées d’activités collectives. Des activités individuelles sont possibles : pratique du culte, visite de l’aumônier, lecture, formation, thérapie. Les personnes détenues isolées ont le droit d’accéder à la lecture. Le CCSP constate, qu’en pratique, cela n’est pas toujours respecté.1
Les personnes en cellule de punition ne perçoivent pas de revenus liés au travail ou à la formation (Loi de principes, article 136).


  1. Conseil central de surveillance pénitentiaire, “Utilisation des cellules de punition et de sécurité dans les prisons belges”, 2021, pp. 130-131. 

Les personnes placées à l’isolement ont le droit de voir leurs proches une fois par semaine. Un dispositif de séparation est imposé lors de cette visite (parloir hygiaphone).