Contributeur(s)Liga Mexicana por la Defensa de los Derechos Humanos | Prison Insider

L’intégrité physique

La peine de mort est abolie depuis 2005. En pratique, la dernière exécution capitale date des années 60.

Les autorités pénitentiaires ne communiquent pas les statistiques relatives au nombre de morts dans les établissements pénitentiaires.

Une mutinerie éclate, le 11 février 2016, suite à l’assassinat d’un chef de gang dans la prison de Topo Chico, à Monterrey. Les bandes rivales de Los Zetas et du cartel El Golfo s’affrontent au couteau et provoquent des incendies. Ils font 49 morts et 12 blessés. C’est le pire incident survenu au cours des trente dernières années au sein d’un établissement pénitentiaire1.

La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) enregistre, entre 2010 et 2014, 7 741 plaintes pour tortures. Celles-ci augmentent en 2014, avec 2 400 plaintes, soit deux fois plus qu’en 2013. Un rapport d’Amnesty International, publié en octobre 2015, affirme que 10 400 plaintes pour mauvais traitements ou torture ont été recensées en 2014.

La plupart des cas de tortures ou de traitements cruels, inhumains et dégradant ont lieu pendant la détention provisoire. Les autorités fabriquent de fausses preuves pour légitimer les arrestations arbitraires.

Les lois mises en place pour lutter contre le crime organisé s’inspirent des lois anti-terroriste adoptées aux Etats-Unis suite aux attentats du 11 septembre 2001. Elles créent un état d’urgence de facto selon lequel l’armée est chargée de maintenir la sécurité publique. Ses membres effectuent à ce titre des missions de police, notamment de police scientifique, malgré leur manque de qualification dans ce domaine. L’arraigo est une mesure de détention préventive préalable à toute enquête bafouant les droits à la défense et isolant les détenus dans les lieux parfois secrets. Il accroit considérablement le recours à la torture.

L’Etat fédéral promulgue une loi visant à réprimer la torture. Le procureur général de la République l’accompagne de directives internes. Aucune mesure n’est prise, pour autant, pour lutter contre l’impunité lors du jugement des responsables et favorable à l’indemnisation des victimes.

L’administration pénitentiaire fédérale tolère les mauvais traitements visant à contraindre les prisonniers. Une pratique, appelée la “bienvenue”, a principalement lieu lors de leur arrivée ou de leur transfert vers un nouvel établissement. Elle consiste à frapper le détenu, l’aveugler, le traîner au sol, le menacer, lui marcher dessus, le menacer de mort et le forcer à prendre des postures dégradantes et douloureuses.

L’administration pénitentiaire encourage les prisonniers à s’autogouverner. Cette pratique génère de la violence et des mauvais traitements. Les gangs contrôlent environ 65% des prisons, notamment les centres de prévention et de réadaptation sociale (Ceresos).

La CNDH enregistre 1 737 incidents violents dans les établissements pénitentiaires du pays en 2014. 82% d’entre eux sont des rixes entre prisonniers.

La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) recense, de 2004 à 2014, 57 890 plaintes pour détention arbitraire1. Elle recevait, en 2006, 350 plaintes par an, pour plus de 1000 aujourd’hui. La Ligue mexicaine pour la défense des droits humains (LIMEDDH) affirme que la lutte contre le crime est responsable de cette augmentation.

Une mesure, nommée arraigo, est inscrite depuis 2008 dans la constitution mexicaine. Elle peut être assimilée à une forme de détention arbitraire légale, qui s’applique aux personnes suspectées d’appartenir au crime organisé. La personne est détenue sans motif légal d’arrestation et placée dans une maison d’arrêt pour une période pouvant aller jusqu’à 80 jours. Il lui est interdit de communiquer avec son avocat ou ses proches. Cette détention s’accompagne en pratique d’actes de torture exercés dans le but d’obtenir des éléments soutenant l’enquête 2.

Les autorités peuvent attendre plusieurs heures, voire des jours, pour contacter les proches d’une personne détenue, même hors arraigo. Les autorités profitent de ces périodes pour obtenir des aveux par la torture. Les délais de comparution devant le juge, prévus par l’article 16 de la Constitution, ne sont pas respectés.

Le procureur général de la République crée, en 2015, le système d’enregistrement des détenus (SIRED). Ce mécanisme permet aux proches d’une personne détenue par le système fédéral d’obtenir des informations sur sa situation tout au long de sa détention. Ce mécanisme devrait éviter la fabrication de fausses preuves par les autorités. Il n’existe pas de document attestant que le SIRED est réellement mis en œuvre.

La LIMEDDH qualifie de prison “clandestine” la section chargée des enquêtes spéciales sur le crime organisé (SEIDO) au sein du sous-bureau du procureur général de la République. Les lieux de détention de la SEIDO ne sont pas entièrement couverts par des caméras de surveillance. Il en résulte un contrôle peu efficace des actes de torture. Les proches de prisonniers peuvent se rendre dans les centres de la SEIDO afin de savoir s’ils y sont incarcérés. Les visites et les entretiens avec des avocats désignés par les prévenus ne sont permis qu’à de rares occasions. Seuls les avocats commis d’office sont systématiquement autorisés à entrer, lesquels ne dénoncent jamais les irrégularités, les mauvais traitements ou les actes de tortures3.

Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a réclamé la libération de cinq défenseurs des droits humains détenus arbitrairement par le gouvernement mexicain : Damián Gallardo (avis 23/2014), Pedro Canché (avis 18/2015) libéré le 29 mai 2015, Librado Baños (avis 19/2015), Nestora Salgado (avis 56/2015) et Enrique Guerrero (avis 55/2015)4.


  1. Centre de droits humains Miguel Augustin Pro Juárez, Rapport sur les violation des droits humains dans le cadre des politiques de sécurité publique et du système de justice pénale du Mexique (à consulter en espagnol) 

  2. Observatoire citoyen du système de justice, Arraigo, mesures conservatoires et d’exécution pénale (à consulter en espagnol) 

  3. Le Mexique traverse la pire crise des droits humains” en Contra Línea, 06/05/2016 (à consulter en espagnol) 

  4. A consulter parmi ces décisions