Contributeur(s)Prison Insider

Le quotidien

Les cellules (parfois appelées “chambres”) sont insalubres et vétustes. L’électricité n’est pas toujours disponible.

Les détenus ne disposent pas tous d’un lit. Certains dorment sur un morceau de mousse usée faisant office de matelas, d’autres dorment dehors.

Avoir accès à certains quartiers mieux équipés coûte de l’argent. Le prix varie selon le nombre de personnes qui y sont détenues, le nombre de toilettes, et la disponibilité de l’eau. Une personne en manque de moyens financiers peut être expulsée de son quartier Les personnes qui ont le plus d’influence et d’argent peuvent être logées dans le quartier VIP dit “Infirmerie”. La surpopulation oblige souvent trois ou quatre personnes à y cohabiter. Les cachots disciplinaires sont devenus des lieux coûteux car ils permettent d’être logé individuellement. Le prix d’entrée d’une cellule avec trois ou quatre places, dans le quartier “Infirmerie”, variait en 2016 de 80 000 FBu (36 €) à 100 000 FBu (45 €). Une cellule au cachot coûtait 200 000 FBu (91 €).

Les repas sont en nombre insuffisant. Une ration se compose de 350 grammes de haricots (avant cuisson) et de 350 grammes de farine de manioc, soit un repas par jour. Les rations sont parfois accompagnées d’huile ou de sel et rarement de riz. L’alcool et le sucre (qui permet de distiller des alcools artisanaux) sont interdits mais ils font l’objet de divers trafics à l’intérieur de la prison.

Les personnes détenues souhaitant avoir accès à deux repas par jour doivent payer entre 20 000 et 80 000 FBu (36 €) par mois.

La nourriture apportée par les proches fait souvent l’objet de troc.

L’accès à l’eau est assuré par le Comité international de la Croix-Rouge.

Les détenus portent théoriquement un uniforme (pantalon et chemise verts). Les “généraux” portent des habits civils.

L’uniforme est censé être fourni à l’entrée en détention et renouvelé tous les ans. En pratique, seuls les prisonniers les plus démunis portent l’uniforme fourni par l’administration car il est chaud et inconfortable, et le manque de tenues oblige souvent les détenus à se les partager. Les prisonniers ayant les moyens se font tailler leur uniforme sur mesure à l’extérieur.

Le ministère de la Santé désigne un médecin pour chaque établissement. Il est chargé de coordonner le travail des infirmiers.

L’infirmerie manque de lits et de moyens pour traiter les cas les plus graves dans la plupart des établissements pénitentiaires.

Les détenus peuvent être transférés à l’hôpital en cas de besoin et les soins hospitaliers sont normalement pris en charge par la Direction générale de l’administration pénitentiaire. Ce n’est pourtant pas toujours le cas. Aussi, les détenus malades qui ne bénéficient pas de cette prise en charge peuvent être refusés par l’hôpital, à moins que leurs proches ne soient en mesure d’acquitter le paiement. Il arrive que des détenus non malades paient un séjour hospitalier pour passer quelques heures à l’extérieur de la prison.

L’association Esther développe un programme de prise en charge des personnes atteintes de VIH/Sida ou de tuberculose à la prison centrale de Mpimba (Bujumbura). Ce programme, en place depuis quelques années, est mis en œuvre par l’ONG SWAA Burundi et le service d’infectiologie du centre hospitalier de Nantes.

Les prisonniers se déplacent entre les quartiers pendant la journée. Les prisonniers dits “VIP” sont libres de se déplacer dans presque toute la prison.

Le Comité international de la Croix-Rouge finance, depuis janvier 2017, des activités sportives dans la prison de Muramvya.

Des équipes de football s’organisent de manière autonome au sein de la prison de Mpimba. Par le passé, des activités théâtrales ont aussi été mises en œuvre dans cette prison.

Les prisonniers ont théoriquement accès à une bibliothèque et aux journaux. Les périodiques sont, en réalité, souvent confisqués à leur entrée dans la prison.

A Mpimba, certains quartiers disposent d’une télévision pour regarder certains matchs de football ou d’autres programmes généraux. Faute de place, tous les détenus ne peuvent pas la regarder.

Certains détenus, parmi les plus aisés, peuvent se procurer une radio. Le cas échéant, les prisonniers écoutent les programmes radiophoniques depuis des téléphones portables entrés en cachette dans la prison.

La liberté de culte est en général respectée.

Dans la prison centrale de Mpimba, une chapelle est réservée aux chrétiens non loin du quartier dit “Infirmerie” et un lieu de prière pour les musulmans est situé à proximité du grand terrain de football.

Pierre-Claver Mbonimpa crée, en 2001, l’Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH). Elle effectuait des visites de monitoring, apportait un accompagnement juridique aux détenus et rédigeait des recours contre des procédures irrégulières ou des dossiers perdus.

Pierre-Claver Mbonimpa est depuis devenu l’un des défenseurs des droits humains les plus respectés du Burundi. Après un séjour en prison entre mai et septembre 2014, il est de nouveau arrêté, le 27 avril 2015, et libéré le jour suivant, dans l’amorce de la crise politique liée à la question du 3e mandat du président Pierre Nkurunziza. Il est victime d’une tentative d’assassinat quatre mois plus tard et exfiltré vers l’Europe pour des soins. Son gendre et son fils sont retrouvés morts respectivement en octobre et novembre 2015.

L’ACAT-Burundi, créée en 2003, apportait de l’aide juridique aux personnes détenues et réalisait des activités de plaidoyer en faveur de l’abolition de la peine de mort. Il en allait de même de la ligue Iteka, la plus ancienne des ligues de défense des droits de l’homme au Burundi (créée en 1991), qui assurait des visites régulières auprès des détenus et avait démocratisé le débat sur la torture dans le pays.

L’ACAT-Burundi, l’APRODH et sept autres organisations de la société civile sont radiées ou suspendues par le pouvoir en place en octobre 2016. La ligue Iteka subit le même sort quelques mois plus tard, le 3 janvier 2017.

Les présidents de ces différentes organisations vivent tous désormais en exil.

L’Association volontaire pour la défense des droits des prisonniers, créée en 2011, est la seule ONG encore autorisée à entrer en détention. Elle est cependant accusée d’avoir été créée par les autorités et ne produit pas de rapports périodiques sur ses activités.

Le site anonyme SOS-Torture / Burundi, lié à la Fédération internationale de l’ACAT, publie, depuis décembre 2015, un rapport hebdomadaire sur les violations des droits de l’humain au Burundi, ainsi que des rapports trimestriels.

Les associations et intervenants palliaient auparavant aux manques de l’administration pénitentiaire en proposant des activités de sport, de théâtre, de danse, de prière, de lecture et de suivi médical.

Le suivi médical et basique (nourriture, eau, désinsectisation, distribution de matériel) est le seul encore assuré aujourd’hui. Il est effectué principalement par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), notamment pour :

  • l’accès à l’eau et l’électricité,
  • la distribution quotidienne des rations de nourriture,
  • les travaux de désinsectisation,
  • la distribution du matériel d’hygiène (savon),
  • le suivi des dossiers médicaux.

L’argent liquide et les services sont les principales monnaies d’échange.

Certains prisonniers dits “VIP” embauchent des codétenus comme “domestiques”.

Les petites sommes d’argent données par des proches permettent aux prisonniers d’acheter des cigarettes à l’unité ou des boissons interdites.

Ils peuvent aussi troquer les biens apportés par leurs proches. La solidarité entre détenus est importante. Elle leur permet de faire face aux difficultés liées aux conditions de détention.

Les “policiers de prison” sont responsables de la sécurité au sein des établissements. Ils dépendent de la police nationale du Burundi (PNB). Ils doivent, en théorie, recevoir une formation spéciale pour travailler en prison.

Trente policiers des prisons assurent la sécurité dans la prison centrale de Mpimba (Bujumbura).

Ils sont affectés, à tour de rôle, aux tâches de surveillance des parloirs, d’accompagnement des visiteurs et de transfert des détenus vers le parquet ou l’hôpital.

Les “généraux” de chaque quartier établissent un règlement interne. Les personnes détenues doivent verser une somme d’argent au “général” pour vivre dans le quartier qu’ils contrôlent.

Les nouveaux détenus sont fouillés à leur arrivée. Les personnels confisquent généralement une partie de leurs effets personnels. Une fois à l’intérieur, ils doivent identifier un codétenu qui leur offre une protection (souvent une connaissance). Les détenus sans protection sont souvent dépouillés de leurs derniers biens par les plus anciens.