Venezuela
Capitale — Caracas
Population du pays
i31/05/2015Taux d'incarcération (pour 100 000 habi…
Nature du régime
Indice de développement humain
i2016/ PNUDMinistère(s) en charge de l'administrat…
Nombre de personnes incarcérées
i2015/ Observatoire vénézuélien des prisons / ICPRTaux d'occupation
i2015/ Observatoire vénézuélien des prisons / ICPRNombre d'établissements
i2015Un MNP est créé
Femmes incarcérées
i2015/ Observatoire vénézuélien des prisons / ICPRMineurs incarcérés
iDéfenseur du peuple (Ombudsman) / ICPRPourcentage de personnes en détention p…
i2015/ Observatoire vénézuélien des prisons / ICPRLa peine de mort est abolie
Ouidepuis 1863
Populations spécifiques
La population carcérale
L’Observatoire vénézuélien des prisons (OVP) recense, en mai 2015, 49 644 personnes privées de liberté (46 883 hommes et 2 761 femmes). La détention préventive représente 63.4% de la population carcérale. Il n’existe pas de séparation entre les prévenus et les condamnés.
Le taux d’occupation global s’élève à 290%. La population carcérale est répartie de manière inégale au niveau national. On estime que le taux d’occupation de la prison de Tocuyito (Valencia) est de 232%. Celui de la prison de San Antonio (Margarita) s’élève à 373%.
Depuis sa création en 2012, le Ministère du service pénitentiaire (MPPSP) a fermé cinq établissements pénitentiaires. La population carcérale a été transférée dans d’autres enceintes, accentuant la surpopulation.
Trois mille détenus sont transférés, en août 2016, à la prison de Tocorón (Maracay). D’une capacité réelle de 750 places, Tocorón accueille actuellement 10 000 détenus, ce qui correspond à un taux d’occupation de 1 500%. L’OVP affirme que l’ordre de transfert des détenus a été donné par le pran, chef du gang armé qui contrôle l’enceinte, dans le but d’augmenter les bénéfices tirés des “impôts” payés par les détenus1.
Le Défenseur du peuple, Tarek William Saab, affirme qu’en septembre 2016, 33 000 personnes se trouvaient détenues dans les cellules des postes de police. D’une capacité d’accueil de 5 000 places, le taux d’occupation national des postes de police est de 660%. La surpopulation empêche la séparation entre les hommes, les femmes et les mineurs. L’OVP signale le cas de détenus qui sont restés jusqu’à deux ans enfermés dans les cellules de commissariat, en attente de jugement ou pour purger leur peine2.
Selon l’OVP, la responsabilité de fournir aux détenus les produits de première nécessité incombe aux services de sécurité. Pour qu’une personne soit transférée dans un établissement pénitentiaire, l’unité de police où elle est détenue, ou sa famille, doit lui fournir un “kit de transfert” (matelas, uniformes, articles d’hygiène, etc.). Le coût de ce kit équivaut à cinq salaires de base. C’est l’une des causes de la surpopulation dans les postes de police3.
Dans les prisons où le “Nouveau régime pénitentiaire” est appliqué, les détenus sont obligés de respecter des règles de l’administration. Afin d’identifier les différentes catégories de détenus, on leur attribue des uniformes de couleurs différentes : les prévenus sont en bleu et les condamnés en jaune. Les femmes sont en rose, quel que soit l’état d’avancement de leur procédure pénale. Malgré cela, les détenus ne sont pas séparés en fonction de la gravité du délit qu’ils ont commis.
OVP: Trasladaron 3 mil reos a Tocorón, una cárcel con 1000 % de hacinamiento“ dans Efecto Cocuyo, 11/08/2016 [en espagnol] ↩
“Hacinamientos de calabozos de Venezuela son “brutales” dans El Nacional, 4/09/2016 [en espagnol] ↩
Prévenus
63,4 %
Les femmes
La population féminine représente 5.5% du total des détenus. Les prévenues ne sont jamais séparées des condamnées.
La majorité de la population détenue (2 119 femmes) est répartie dans les 15 annexes situées au sein des prisons pour hommes.
Les établissements pénitentiaires des États Zulia et Bolívar sont dépourvus d’annexes pour les femmes. Les femmes purgent leurs peines dans des postes de police et partagent leurs cellules avec des hommes.
Les annexes ne possèdent pas de cours de promenade ni de personnel médical adapté.
Marianela Sánchez, membre de l’OVP, dénonce le cas d’une femme détenue dans l’annexe David Viloira de la prison d’Uribana, qui souffre d’infections cutanées, de façon chronique, tout au long de ses quatre années de détention. L’eau administrée est polluée1.
L’Institut national d’orientation féminine (INOF), la seule prison pour femmes du pays, accueille 642 détenues, dont 48 sont étrangères. D’une capacité d’accueil de 250 places, le taux d’occupation est de 256.8%.
L’OVP constate “une grave situation de surpopulation, [dans laquelle] 6 à 7 détenues se voient contraintes à partager une cellule individuelle de 2 mètres sur 3”. Certaines dorment à même le sol ou sur du papier journal. Des fuites d’eaux usées à l’intérieur des cellules sont observées. Elles sont le résultat du mauvais état des canalisations. L’accès à l’eau filtrée est limité. Les détenues se voient contraintes d’acheter des bidons d’eau vendus à un prix trois fois supérieur à celui du marché.
L’INOF affiche des taux de violence plus bas et de meilleures conditions de vie que dans la plupart des établissements pénitentiaires. L’OVP relève de son côté des cas où le personnel force les détenues à avoir des relations sexuelles en échange d’un service de protection.
L’OVP dénonce le fait que la population carcérale féminine n’a pas accès à des produits de première nécessité comme du savon ou des serviettes hygiéniques.
Les femmes détenues n’ont pas droit aux visites conjugales. L’administration pénitentiaire avance comme argument la nécessité de prévenir les maladies sexuellement transmissibles et les grossesses.
Les détenues enceintes accouchent dans un hôpital. Des problèmes surgissent régulièrement pendant le transfert. Une femme détenue au poste de police de Los Teques (Caracas), en plein travail, doit être transférée successivement dans cinq hôpitaux différents, sur une durée de plus de 24 heures. Aucun des établissements n’était doté du personnel ou des équipements nécessaires pour la prendre en charge2.
Un enfant peut rester avec sa mère dans un établissement pénitentiaire jusqu’à l’âge de quatre ans. L’OVP comptabilise, en mai 2016, entre 18 et 20 enfants qui vivent dans l’INOF. Le centre possède une crèche mais n’offre pas le suivi médical ou psychologique adapté.
Urge una nueva cárcel para mujeres“ dans El Universal, 09/03/2015 [en espagnol] ↩
“Prisión en Venezuela: Las inhumanas condiciones de una reclusa embarazada” dans Visión Global, 21/04/2015 [en espagnol] ↩
Femmes détenues
5,5 %
Les mineurs
Selon le Défenseur du peuple, 2 052 mineurs sont privés de liberté en juin 2015 (92.2 % de garçons et 7.8 % de filles).
Le “Nouveau régime pénitentiaire” est appliqué dans les 31 centres de détention pour mineurs du pays. La gestion des établissements est confiée au ministère de la Santé ou aux municipalités.
La Loi organique pour la protection de l’enfant et de l’adolescent (LOPNA) est modifiée en 2014 : la peine maximale pour un mineur passe alors de cinq à dix ans.
Selon le criminologue Fermín Mármol García, 60 % des délits enregistrés au niveau national sont perpétrés par des mineurs. Les plus communs sont le trafic de drogue, le vol à main armée et les homicides1. Les enquêtes vont rarement à leur terme et la plupart des délits ne sont donc pas poursuivis.
Les centres de détention pour mineurs enregistrent des niveaux de violence élevés. Les évasions, mutineries et bagarres sont fréquentes au niveau national.
A.B.S, un jeune homme de 17 ans, emprisonné pour le vol d’un téléphone portable, est assassiné et démembré par ses codétenus, en novembre 2014, dans l’unité socioéducative “Gral. José Francisco Bermúdez” de Monagas. Sa mère déclare à la presse que son fils a été assassiné pour ses convictions religieuses et son refus d’appartenir à un gang2.
Trente-trois mineurs s’évadent du centre de détention “Los Cocos”, le 12 avril 2015, sur l’île de Margarita. Huit d’entre eux sont arrêtés au bout de quelques heures. Les proches dénoncent la surpopulation et les mauvais traitements physiques subi par ces jeunes. Une situation semblable avait été relevée dans la même établissement, en avril 2014, où une mutinerie avait donné lieu à l’évasion de dix détenus3.
Une mutinerie éclate, le 18 janvier 2015, dans le Service de protection de l’enfant et de l’adolescent de Miranda (Sepinami), suite à la décision des surveillants de réduire le temps du parloir à une demi-heure. Cette décision est prise suite à la découverte d’une grande quantité de téléphones portables lors d’une fouille. En signe de protestation, les jeunes brûlent trente matelas et creusent un trou pour s’évader. Aucun mort ni blessé ne sont recensés 4.
Les jeunes de l’Unité socioéducative “Dr. Jesús María Rengel”, dans l’État de Monagas, prennent le contrôle de la prison pendant plusieurs jours en septembre 2015. Les douze employés ont dû abandonner l’enceinte car leur vie était en danger5.
“Menores de edad: protegidos para delinquir” dans El Estímulo, 24/09/2015 [en espagnol] ↩
“Madre de menor descuartizado en Polimonagas narra su versión de los hechos” dans Oriente 20, 30/02/2015 [en espagnol] ↩
Nueva fuga en retén de menores de Nueva Esparta“ dans El Universal, 14/04/2015 [en espagnol] ↩
Motín en el Sepinami“ dans Avance24, 19/01/2015 [en espagnol] ↩
“Situación del retén de menores está controlada en un 70 %” dans El Periódico de Monagas, 15/11/2015 [en espagnol] ↩
Mineurs détenus
4,1 %
Le nombre de prisonniers politiques augmente depuis plusieurs années. Selon le Foro Penal, ils étaient une douzaine en 2012. L’organisation affirme qu’ils sont 115, en mars 20171 2.
Les prisonniers politiques qui attirent l’attention des médias sont détenus dans la prison militaire Rama Verde, afin de les protéger.
“La Tumba”, centre de détention souterrain situé au siège du Service bolivarien d’intelligence nationale (SEBIN), près de la Plaza Venezuela à Caracas, est dénoncé par l’ONG Justicia y Proceso pour utiliser des méthodes de “torture blanche” sur des prisonniers politiques afin de les forcer à plaider coupable pour des délits qu’ils n’auraient pas commis.
Les cellules mesurent deux mètres sur trois, sont pourvues de lits en béton, de murs blancs et de caméras de sécurité. Les liens entre détenus sont limités au maximum et une lumière blanche reste allumée 24 heures sur 24. Les cellules sont maintenues à une température de 0°C.
Rodolfo González, détenu au siège du SEBIN depuis avril 2014, se suicide le 13 mars 2015, après avoir été informé de son futur transfert à la prison de Yare II, connue pour être très violente3.
La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) ordonne, le 2 mars 2015, des mesures de protection en faveur de Lorent Saleh et Gerardo Carrero –tous deux détenus au siège de la SEBIN–, car la fragilité de leur état de santé, associée aux mauvais traitements et tortures qu’ils subissent, mettent leur vie en danger4 5.
“Au Venezuela, Leopoldo Lopez et les prisonniers politiques sont des otages” dans Le Monde, 13/06/2016 ↩
Foro Penal, “Balance de Presos Políticos“ [en espagnol] ↩
“Muere en prisión Rodolfo González, opositor detenido en manifestaciones en Venezuela” dans BBC Mundo, 13/03/2015 [en espagnol] ↩
Commission interaméricaine des droits de l’homme, résolution 6/2015 [en espagnol] ↩
“Au Venezuela, un opposant à Maduro croupit dans la “Tombe” des dissidents”, Libération, 21/06/2016 ↩