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Le quotidien

La loi prévoit un droit à l’encellulement individuel depuis 1875, réaffirmé en 2000. Il n’est pas respecté. Les moratoires se succèdent dans l’attente d’une impossible adéquation entre le nombre des personnes détenues et le nombre de places.

Au 1er janvier 2014, on comptait ainsi 49 681 cellules, dont 3 500 à 4 000 cellules de moins de 8m² et 6 553 cellules doubles.

Les détenus sont au nombre de 1006, au 1er janvier 2015, à ne pas disposer de lit et leur matelas est posé à même le sol. Trois personnes peuvent occuper une cellule d’une place, quatre personnes une cellule de deux places. Magistrats, parlementaires et administration pénitentiaire continuent de créer des situations où plusieurs personnes occupent une seule place.

Les cellules sont habituellement équipées d’une chaise et d’une petite armoire par personne et d’une table. Les personnes qui partagent la même cellule déplorent que les armoires ne ferment pas à clé. Toutes se plaignent du caillebotis qui obstruent les fenêtres des cellules. On constate des défauts de ventilation et de luminosité des cellules des vieux établissements.

Saisi en référé par l’OIP-SF sur les conditions de détention et la surpopulation de la prison de Nîmes, le Conseil d’Etat confirme, dans une décision du 30 juillet 2015, qu’elles exposaient les personnes détenues à un traitement inhumain ou dégradant portant une atteinte grave aux libertés fondamentales.

L’administration distribue trois repas par jour, aux heures habituelles. Les repas sont pris en cellule. La qualité et la quantité sont souvent considérées comme insuffisantes.

Les personnes détenues peuvent également cuisiner dans leur cellule, au moyen d’ustensiles de leur confection dans les établissements vétustes. Les prisons récentes disposent de plaques chauffantes. Il est possible de faire l’acquisition (cantiner) des produits alimentaires ou de louer un réfrigérateur. Les prix, en gestion déléguée, sont très souvent plus élevés que dehors. Une enquête menée par une personne détenue en juillet 2015 à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas fait état de certains produits pouvant être jusqu’à 57 % plus coûteux en détention qu’à l’extérieur. L’administration consent un effort particulier sur ces prix quand elle est en gestion directe.

Les pratiques culturelles, religieuses et les régimes sont, en théorie, pris en compte. Cette mise en œuvre est jugée insuffisante par beaucoup. L’absence de produits hallal dans les menus proposés est à l’origine du service de très nombreux menus végétariens.

L’hygiène, dans les nouveaux établissements, est habituellement jugée correcte. Les établissements plus vétustes ne remplissent pas les exigences minimales malgré des rénovations entreprises. La maintenance fait défaut. Des nuisibles sont présents, les douches sont dégradées, voire sales.

L’entretien des cellules est à la charge des occupants. Les produits d’entretien fournis par l’administration ne couvrent pas toujours l’ensemble des besoins. Seul le nettoyage de la literie est pris en charge. Le nettoyage des vêtements est à la charge des personnes détenues ou de leurs proches qui peuvent apporter du linge lors des parloirs.

Les lavabos et sanitaires sont placés dans les cellules (ces derniers étant désormais majoritairement séparés du reste de la cellule). Les douches sont collectives dans les établissements vétustes. Les détenus y ont accès au moins trois fois par semaine. Une trousse comprenant des produits d’hygiène corporelle (papier hygiénique, tube de dentifrice, savon, etc.) est remise à l’arrivée. Elle ne couvre pas tous les besoins (notamment pour les produits d’hygiène féminine), et n’est renouvelée que pour les personnes indigentes.

Il est alloué mensuellement, à la maison d’arrêt de Digne (Alpes de Haute-Provence) cinquante sacs de poubelle de 30 L par cellule (jusqu’à six occupants) ainsi qu’un rouleau de papier hygiénique et un berlingot de 120 ml d’eau de javel à 3,6 % par personne détenue. Un savon est aussi remis à la demande.
L’établissement dispose d’une buanderie équipée d’un lave-linge et d’un sèche-linge professionnels. Ce matériel permet à un auxiliaire de nettoyer le linge du paquetage, le linge des travailleurs, le linge des personnes dépourvues de ressources et le linge de celles ne recevant pas de visite.

Les soins relèvent du service public hospitalier (ministère de la santé) depuis la loi du 18 janvier 1994. Leur organisation repose sur deux dispositifs : l’un pour les soins somatiques, l’autre pour les soins psychiatriques.

  • Les soins de niveau 1 comprennent les soins relevant de consultations, d’actes externes, de prestations et d’activités ambulatoires. Les unités sanitaires assurent les consultations et examens ne nécessitant pas d’hospitalisation et relevant de la médecine générale (anciennes Unités de consultation et de soins ambulatoires). Elles sont présentes dans presque tous les établissements. Elles accueillent des infirmiers et des médecins généralistes

  • Les soins de niveau 2 comprennent les hospitalisations à temps partiel. Ils permettent aux personnes de disposer de soins ou d’examens polyvalents, individualisés, intensifs, prodigués dans la journée. Les soins somatiques sont assurés en milieu hospitalier, les soins psychiatriques en milieu pénitentiaire au sein des unités sanitaires.

  • Les soins de niveau 3 sont ceux nécessitant une hospitalisation complète. Les soins somatiques, sont assurés dans des quartiers aménagés au sein des hôpitaux les plus proches (hospitalisations courtes ou urgentes).Les hospitalisations plus longues (supérieures à 48 heures) se réalisent dans des établissements dédiés (unité hospitalière sécurisée interrégionale). Les hospitalisations psychiatriques se réalisent au sein d’unités hospitalières spécialement aménagées, avec ou sans consentement.

Il existe :

  • 175 unités sanitaires au sein des prisons.
  • 8 unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) implantés dans les centres hospitaliers universitaires (CHU) pour les hospitalisations programmées de plus de 48 heures : Nancy, Lille, Lyon, Bordeaux, Toulouse et Marseille, Paris Pitié-Salpêtrière, Rennes. Au total 181 lits en UHSI sont ouverts.
  • 1 établissement public de santé national à Fresnes.
  • 26 services médico psychologiques régionaux (SMPR) implantés dans 26 établissements pénitentiaires.
  • 7 unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) implantées en milieu hospitalier. Elles accueillent les hospitalisations psychiatriques (avec ou sans consentement) : Lyon, Nancy, Toulouse, Orléans, Paris, Lille et Rennes. Deux UHSA ouvrent leurs portes à Bordeaux et à Marseille en 2016.

L’accès aux unités sanitaires demeure très inégal selon les prisons. Celui relevant de la médecine générale se révèle, dans l’ensemble, satisfaisant bien que soumis aux contraintes des établissements (activités sur les mêmes horaires, procédures disciplinaires en cours, etc.). Les difficultés les plus habituellement signalées concernent la préservation du secret médical et le manque de moyens dans les unités sanitaires.

Les soins spécialisés, notamment ophtalmologiques ou dentaires, ou concernant les pathologies chroniques, connaissent de graves lacunes. Les médecins spécialistes ne sont pas en nombre suffisant. Les rendez vous se prennent par écrit et en obtenir un peut prendre plusieurs mois. Le secret médical n’est pas garanti.

Dans sa recommandation (en urgence) du 13 mai 2015, le CGLPL relève des atteintes au secret médical du fait de la présence de caméras de vidéo-surveillance dans des locaux thérapeutiques. Les personnels infirmiers qui avaient protesté contre la présence de ces caméras se sont vus retirer leur habilitation.

L’OIP-SF signale que la prise en charge médicale de Mohamed D., détenu à la maison centrale de Clairvaux, est, depuis mars 2015, régulièrement entachée de graves violations du secret médical et de la confidentialité des soins. Radio et prises de sang faites en présence de personnels pénitentiaires, parfois équipés de casques et de tenues anti-émeutes, à l’intérieur des locaux de soins, consultations médicales réalisées avec menottes dans le dos. Ces mesures sont appliquées contre l’avis des soignants.

Dans un communiqué daté du 15 juillet 2015, l’OIP informe qu’au dernier trimestre 2014, au moins 300 demandes de rendez-vous chez le dentiste du centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse sont restées sans suite. En cause, le manque de moyens humains et matériels alloués à l’unité sanitaire de la prison et la difficulté de trouver des chirurgiens-dentistes qui acceptent de venir travailler en milieu pénitentiaire. L’un des dentistes de l’établissement indique que la personne qui l’assiste n’est pas remplacée en cas d’absence ou de congés.

Le CGLPL relève, dans un avis sur la prise en charge des personnes détenues au sein des établissements de santé publié en juillet 2015, que de nombreuses extractions médicales sont annulées et reportées en raison de l’indisponibilité des escortes pénitentiaires. Il aborde notamment les conditions des extractions médicales, le secret médical, les conditions d’accueil des détenus dans les hôpitaux, particulièrement dans les chambres sécurisées. L’institution note que du métal recouvre entièrement l’ouverture de la baie vitrée dans les chambres sécurisées du centre hospitalier de Mulhouse. L’ameublement est parfois inexistant. Aucune cour de promenade n’a été aménagée pour les patients détenus à l’UHSI de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Le secret médical n’est pas respecté. L’utilisation des moyens de contrainte demeure problématique.

Les personnes détenues peuvent participer à des activités dont l’offre varie d’un établissement à l’autre. Elles sont tenues, depuis 2009, d’en exercer au moins une. L’accès aux cours de promenade est un droit (en général 1h30 par jour) mais n’est pas libre.

Les activités proposées ne couvrent pas les besoins. L’administration pénitentiaire estime en moyenne et toutes activités confondues (hors promenade), à une heure le temps d’activité par jour et par personne détenue. Les activités cessent en dehors des heures ouvrables et le week-end. Les critères d’inscription restent opaques et soumis à l’autorisation de l’administration. Des contraintes pratiques (manque de salles, limitation des budgets, diffusion de l’information) empêchent parfois les activités de se tenir. Des constats similaires sont dressés en ce qui concerne le sport.

Il est souvent difficile pour les personnes détenues de connaître les activités proposées, comme au centre de détention de Roanne, où les activités sont affichées seulement sur des feuilles volantes.

L’OIP-SF remarque, en avril 2016 une offre d’activités limitée et insuffisamment tournée vers la sortie. A la maison d’arrêt de Carcassonne (taux d’occupation de 190 %), seules trois activités sont proposées : code de la route, bibliothèque et premiers secours.

Des bibliothèques existent dans chaque établissement. Elles sont conventionnées avec les bibliothèques municipales ou départementales. Les ouvrages en langue étrangère sont encore trop peu nombreux et les horaires d’ouverture trop restreints (en moyenne 21 heures par semaine).

Le travail en prison revêt trois formes principales :

  • Le service général : il désigne l’ensemble des emplois de détenus pour le fonctionnement de la prison (maintenance, restauration, entretien des lieux de vie collective)

  • Les ateliers de la régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP), gérée par le service de l’emploi pénitentiaire (SEP). Ce service organise la production de biens et de services par des détenus et en assure la commercialisation (informatique, PAO, imprimerie, menuiserie, confection, métallerie, agriculture…). 1 200 détenus travaillent dans 48 ateliers implantés dans 27 établissements. Le chiffre d’affaires annuel (HT) de 22,8 millions d’euros pour 6 millions d’euros versés en salaires.

  • Le travail en concession : les détenus travaillent pour le compte d’entreprises privées qui installent un atelier en prison. Ils prennent le plus souvent la forme d’opérations manuelles simples (mise sous pli, conditionnement).

Les détenus peuvent aussi travailler pour leur propre compte ou pour une association.

Le cumul des emplois précités ne donne accès à un travail qu’à un quart des personnes détenues.

Le droit du travail, pour son immense majorité, ne s’applique pas en détention : pas de salaire minimum, pas de contrat de travail. L’application d’un forfait journalier au service général et la rémunération à la pièce en atelier peuvent perdurer. Les dispositions de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire ne s’appliquent pas encore pleinement et laissent à l’administration un pouvoir exorbitant.

Les personnes travaillant en production pour le compte d’entreprises privées ou du Service de l’emploi pénitentiaire (SEP) devraient percevoir une rémunération horaire brute équivalente à 45 % du SMIC (soit 4,32 euros au 1er janvier 2015). Le taux varie au service général selon la classification du poste : 33 % du SMIC pour un poste de classe I (soit 3,17 euros au 1er janvier 2015) ; 25 % pour un poste de classe II (soit 2,40 euros au 1er janvier 2015) et 20 % pour un poste de classe III (soit 1,92 euro au 1er janvier 2015).

Suite à la mobilisation de 375 universitaires et d’un large réseau d’associations, le Conseil constitutionnel juge, le 25 septembre 2015, que l’absence de cadre légal de travail en détention n’est pas contraire aux droits et libertés garantit par la Constitution.

Le CGLPL a réagi à cette décision : “Sans méconnaître les nécessaires contraintes liées à l’incarcération, il est anormal que dans un état de droit les personnes détenues ne bénéficient, lorsqu’elles travaillent, d’aucune garantie au regard notamment de la durée du travail, de la sécurité au travail, de la protection sociale. (…)

Détenus travaillant

25 %

La population carcérale pâtit, en génral, d’un faible niveau de formation. Près d’une personne sur quatre (22%) échoue aux tests de lecture, près d’une personne sur deux n’a aucun diplôme (43,5%) et plus des trois quarts ne dépassent pas le niveau correspondant au certificat d’aptitude professionnelle (76%).
Des actions de lutte contre l’illettrisme sont mises en place mais elles ne sont pas systématiques.

La formation générale en détention dépend du ministère de l’Éducation nationale et la formation professionnelle est, depuis le 1er janvier 2015, confiée aux régions.
En 2014, un quart des personnes détenues a été scolarisé et 22 514 personnes détenues ont suivi une formation professionnelle.

Des freins liés à l’organisation de la détention, au manque de crédits, d’équipement et de personnels limitent grandement l’accès aux formations et à la scolarisation des personnes détenues. L’offre de scolarisation s’éloigne des exigences du milieu libre.

L’accès à l’information (presse, télévision) est garanti sous réserve de la sécurité des établissements. Les services sont payant. Certains quotidiens régionaux sont diffusés gratuitement par leur éditeur.

L’accès à internet est prohibé en détention malgré quelques expérimentations. L’accès au matériel informatique (demande individuelle ou dans le cadre d’une formation) se révèle insuffisant. Il est lui aussi assujetti aux contraintes de sécurité des établissements. La tension entre les contraintes posées par l’administration pénitentiaire et les évolutions technologiques est criante.

Le principe de laïcité garantit le libre exercice du culte, sous la responsabilité de l’administration.

Les intervenants d’aumônerie désignent à la fois les aumôniers qui peuvent être indemnisés ou bénévoles, et les auxiliaires bénévoles d’aumônerie. On dénombre, au 1er janvier 2015, 1628 intervenants d’aumônerie dont 453 aumôniers indemnisés, 972 aumôniers bénévoles et 203 auxiliaires bénévoles d’aumônerie.
La répartition par culte est la suivante : 760 intervenants d’aumônerie pour le culte catholique, 377 pour le culte protestant, 193 pour le culte musulman, 111 pour les Témoins de Jéhovah, 75 pour le culte israélite, 52 pour le culte orthodoxe, 10 pour le culte bouddhiste et 50 pour les autres cultes.

Les aumôniers catholiques et protestants représentent plus de la moitié des aumôniers indemnisés et les aumôniers musulmans environ le tiers. De fortes disparités sont constatées en matière de moyens, de rémunération (sous forme de vacation ou non, complément versé par le culte ou non) et de nombres d’agréments délivrés entre les différents cultes. Il en résulte des difficultés pour pratiquer certains cultes, notamment le culte musulman ou ceux qui requièrent une pratique assidue.

Les exigences de la vie spirituelle ne sont pas toujours satisfaites. Les détenus ne sont pas toujours autorisés à garder leurs objets religieux avec eux. Peu d’établissements proposent des aliments conformes aux prescriptions rituelles.

Les pratiques religieuses ne se déroulent pas toujours dans des lieux prévus et aménagés. Les établissements les plus vétustes, en particulier, ne disposent pas de tels espaces dédiés. Il arrive que le culte soit interrompu en raison de l’écoulement du temps imparti alors même que l’office a débuté avec un retard significatif et dont la responsabilité n’incombait pas aux personnes détenues.

Les actions des intervenants extérieurs sont diverses : visites, activités sportives, culturelles, cultuelles, d’enseignement, soutien matériel, accès au droit, etc. Certaines actions se déroulent également en dehors des établissements : accueil des familles et proches en attente de parloir, actions auprès du public sortant (réinsertion professionnelle, hébergement).

Les intervenants extérieurs sont majoritairement bénévoles.

L’administration établit des conventions avec 21 structures associatives à l’échelle nationale, dans différents domaines : accès au droit, visite, actions de prévention sanitaire, de réinsertion, etc. La plupart sont accompagnées de protocoles financiers qui prennent la forme d’une subvention annuelle dont le montant varie d’une année à l’autre.

Le maillage associatif est également développé au niveau local. Presque chaque établissement jouit d’un réseau associatif qui intervient en son sein. Une conventions peut être passée avec l’établissement pénitentiaire concerné.

Le nombre d’intervenants est très fluctuant d’une ville à une autre. L’isolement géographique de certaines prisons ne facilite pas l’intervention de personnes extérieures.

Un annuaire recense les associations intervenant dans ou autour des prisons (en français uniquement).

La détention constitue une rupture financière pour les personnes détenues (perte d’un salaire, des minima sociaux) mais également pour leurs familles et proches (envoi de mandats, déplacement au parloir, etc.). La population carcérale est majoritairement une population pauvre.

La gestion de l’argent est assurée par l’administration, qui ouvre un “compte nominatif” pour chaque personne. L’argent perçu (fruit d’un mandat, du travail) est, chaque mois, divisé entre ce qui est disponible pour la personne détenue, le pécule de libération, et l’indemnisation des parties civiles le cas échéant.

L’administration peut décider d’allouer une somme aux personnes dites indigentes. Le code de procédure pénale définit ces “personnes sans ressources suffisantes” sur le critère des ressources de leur compte nominatif. Le seuil est fixé à 50€ par mois. Les aides sont très hétérogènes d’un établissement à un autre : elle sont prioritairement versées en nature (vêtements, renouvellement de la trousse de toilettes), mais peuvent aussi être versée en numéraire. L’aide financière aux personnes indigentes repose parfois sur le secteur associatif présent localement.

L’expression des personnes détenues, qu’elle soit individuelle ou collective, est soumise au contrôle de l’administration. Les personnes détenues sont de fait privées du droit de réunion et d’association, sans que ces droits leur aient été retirés par la condamnation pénale. Quelques timides expériences de réunions, conseils d’évaluation par exemple, sont proposées. Tout mouvement collectif, même pacifique, reste passible de sanctions disciplinaires.

Depuis la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire, les personnes détenues doivent être consultées (sous forme de questionnaire, de réunions par exemple) sur les activités qui leur sont proposées. Cette obligation peine encore à se matérialiser et reste très en deçà des recommandations européennes.

Des journaux internes sont parfois réalisés, mais ils font rarement état des préoccupations des personnes détenues. Le canal vidéo interne (qui permet de diffuser les informations de l’établissement), quand il existe, peut être utilisé à des fins informatives.

L’expression individuelle des personnes détenues est difficile. Les requêtes que l’emprisonnement génère (voir le personnel de probation, voir un médecin, demander à travailler, entrer en contact avec ses proches) doivent obligatoirement être formulées par écrit et transmises à qui de droit. Leur traçabilité n’est pas toujours bien identifiée. Les réponses ne sont pas toujours données, ou pas données à temps, souvent trop laconiques.

Les établissements pénitentiaires ne favorisent pas les échanges. Le personnel n’est pas toujours formé à recevoir les requêtes.

Des personnes détenues sont parfois associées à certains aspects de la vie en détention, la plupart du temps sur la base du volontariat. Par exemple, les auxiliaires sport ou les “co-détenus de soutien”. Ces derniers sont entendus dans le cadre de la conception et de la mise en œuvre du dispositif de prévention du suicide.

L’administration recense, en 2014, 679 mouvements collectifs dont 44 ont nécessité l’intervention des forces spéciales dont l’action se résume à l’usage de la force. Les chiffres pour l’année 2015 ne sont pas communiqués. Les équipes régionales d’intervention spécialisées (ERIS) regroupent 313 agents et participent notamment au rétablissement et au maintien de l’ordre en cas de mouvements collectifs ou individuels.

Les mouvements de protestation collective ont habituellement pour objet la dénonciation des conditions de détention ou les dysfonctionnements de l’établissement. Ils prennent la forme d’un refus de remontée de cour de promenade, d’un refus des plateaux repas ou d’un rassemblement dans les ateliers.

189 détenus de la maison d’arrêt de Rémire-Montjoly (Guyane) refusent, le 16 juin 2015, de regagner leurs cellules à l’issue de la promenade. Ils dénoncent dans une pétition “la lenteur de la justice, le manque d’activités, l’insalubrité, l’hygiène et l’alimentation déplorables, mais aussi des problèmes d’accès aux soins et des brimades de la part de surveillants…”.

La loi autorise les fouilles corporelles, intégrales ou non, justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que le comportement des personnes fait courir à la sécurité des personnes et de l’établissement.
La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 ne les autorisent plus que de façon exceptionnelle lorsque les autres moyens de contrôle (palpation, détection électronique) demeurent insuffisants. Dans la pratique, ces principes peinent à être pleinement respectés. Ils se heurtent aux revendications véhémentes de certaines organisations syndicales de surveillants.
Les investigations corporelles internes sont proscrites sauf impératif spécialement motivé, soumis à la discrétion des agents pénitentiaires.

Le régime et la procédure disciplinaire, bien qu’agrémentés de quelques garanties procédurales, demeurent encore fortement discrétionnaires. L’administration répond souvent aux violences et tensions par la répression (placement en cellule disciplinaire, autrement appelé mitard) alors que des sanctions moins coercitives existent (avertissement, privation d’activités).

Après les attentats de janvier 2015 à Paris, des unités dédiées aux personnes dites “radicalisées” ont été décidées dans quatre prisons, pour un total de 117 places. Les pouvoirs publics estiment à 1500 le nombre de ces personnes détenues susceptibles d’entrer dans un processus de conviction terroriste, au nom d’une idéologie islamiste destructrice. 15 % d’entre elles se seraient radicalisées en prison.

Avocats, associations ou autorités administratives expriment un point de vue critique sur les regroupements de détenus “radicalisés”.

Ainsi le CGLPL, dans un avis publié en juillet 2016 consigne : “Le regroupement de détenus radicalisés dans des quartiers dédiés, annoncé par le Premier ministre en janvier 2015, présente des risques qui ne paraissent pas avoir été pris en compte, notamment la cohabitation de personnes détenues présentant des niveaux d’ancrage très disparates dans le processus de radicalisation. Les difficultés d’identification des personnes visées ne sont pas résolues, malgré une réévaluation des outils engagée récemment par l’administration pénitentiaire. Leur regroupement au sein de quartiers dédiés ne relève d’aucune disposition légale existante, ce régime sui generis ne s’apparentant ni à la détention ordinaire, ni à la mise à l’isolement.”