Contributeur(s)Think Centre / Prison Insider

Le quotidien

Les prisonniers purgeant des peines d’emprisonnement courtes (moins de deux ans) partagent leur cellule.

La surface d’une cellule standard est de 11 m². Elle peut accueillir 3 à 4 prisonniers. Les cellules de groupe peuvent accueillir 4 à 18 personnes.

Les cellules simples sont réservées aux détenus condamnés à une longue peine s’ils font preuve de bonne conduite ou sont condamnés avec des circonstances atténuantes. Il n’y a pas de lits. Les détenus dorment à même le sol. Le SPS ne fournit qu’une natte de paille et une couverture. Il n’y a pas d’oreillers. Les lumières et les caméras de sécurité sont toujours allumées.

Chaque cellule est équipée de toilettes ouvertes et d’une douche. Les détenus doivent faire leurs besoins devant leurs compagnons de cellule.

Les cellules sont mal ventilées et humides. Il n’y a pas de ventilateurs ou de système de climatisation, malgré le climat tropical (30 à 40 degrés Celsius tout au long de l’année). De petits trous dans le mur laissent passer l’air et permettent aux détenus de distinguer le jour de la nuit.

Les prisonniers reçoivent trois repas par jour.

Selon les autorités pénitentiaires, le régime alimentaire est équilibré et basé sur des recettes locales.

Il n’y a pas de réfectoire ; les prisonniers mangent leur repas dans leur cellule. Les plats sont passés à travers un petit trou rectangulaire au bas de la porte de la cellule. Les détenus doivent manger à même le sol, là où ils dorment. Le sol est nettoyé avec du savon et une serviette après chaque repas.

Le petit déjeuner se compose de quatre morceaux de pain avec du beurre, de la confiture et du café ou du thé. Pour le déjeuner et le dîner, les détenus ont le choix entre riz et pain et reçoivent une ration d’aliments protéinés et de légumes. Un exemple de menu-type : un œuf à la coque avec du chou et du riz, ou un morceau de poulet avec des légumes mélangés, du riz et de la sauce. Les prisonniers n’ont pas la possibilité de cantiner pour obtenir de la nourriture supplémentaire.

Les menus ne respectent pas les pratiques religieuses. Les régimes médicaux sont pris en considération mais aucun substitut n’est proposé. Par exemple, les détenus diabétiques ne mangent que du pain avec du beurre au petit-déjeuner, sans aucun substitut à la confiture.

Les différents menus se distinguent par un système de codes colorés :

  • vert = normal
  • bleu = sans sucre
  • jaune = sans haricots
  • rouge = légumes.

Les détenus doivent faire leurs besoins dans des toilettes turques placées à l’intérieur des cellules. Le papier toilette n’est pas toujours disponible.

Les douches sont de petits bacs en béton à l’intérieur des cellules. Les détenus doivent se laver devant leurs compagnons de cellule. La douche est à 17 heures.

L’eau potable n’est pas accessible en-dehors des heures de repas.

Les hommes portent un t-shirt blanc, un short bleu et des claquettes en caoutchouc. Les femmes portent un pull et un pantalon en coton. Les cheveux des femmes sont coupés à hauteur des oreilles dès leur arrivée. À leur arrivée, les détenus reçoivent :

  • une grande boîte en plastique
  • une tasse à boire en plastique avec couvercle
  • un bassin en plastique rond avec couvercle
  • une brosse à dents
  • un tube de dentifrice
  • un rouleau de papier hygiénique
  • une cuillère en plastique léger
  • une petite serviette
  • une natte de paille
  • une couverture grise

Le Raffles Medical Group, fournisseur de soins privés en Asie, est chargé des prestations médicales au sein des prisons.

Les détenus nécessitant des soins particuliers peuvent être transférés à l’hôpital général de Changi.

Un membre du personnel vérifie quotidiennement si des détenus se déclarent malades. Si oui, une consultation médicale est prévue pour le lendemain.

Les détenus qui se déclarent malades doivent rester dans leur cellule 24 heures sur 24 pendant les trois jours suivants. Ceux qui ont une forte fièvre sont isolés dans une cellule individuelle. Les lits à l’infirmerie n’ont pas de matelas, mais une plaque de métal perforée. Les détenus sont enchaînés au lit par la cheville. Dans certains cas, un poignet est également attaché au cadre du lit. Les détenus, ainsi attachés, doivent se soulager dans un petit seau. Ils doivent se débrouiller pour amener le seau sur le lit et s’agenouiller pour satisfaire leurs besoins. Un nombre important de prisonniers présentent des troubles mentaux. Les conditions de vie difficiles en sont le facteur principal. Le personnel médical injecte de fortes doses de neuroleptiques, ce qui provoque parfois des dyskinésies.

Les détenus souffrant de troubles mentaux sont placés dans des cellules où les lumières sont allumées 24 heures sur 24. Cela nuit à leur sommeil et aggrave leur état. Le SPS justifie cette mesure par la surveillance ainsi facilitée pendant la nuit. Des méthodes moins invasives existent pourtant, à l’instar des caméras de nuit infrarouges. L’administration pénitentiaire ne les utilise pas.

Les détenus passent 23 heures par jour enfermés dans une petite cellule. Ils ont droit à une heure d’exercice le lundi, mercredi et jeudi. Il s’agit généralement d’une heure de basketball à l’intérieur. Il n’y a pas d’installations de loisirs, de gymnases ou de terrains de football.

Une heure d’activité en salle de jour a lieu le mardi, le vendredi et le samedi : les prisonniers peuvent par exemple regarder la télévision, jouer aux échecs et lire des journaux.

Toutes les activités ont lieu à l’intérieur. Les prisonniers peuvent rester des années sans voir la lumière du soleil ou aller dehors.

Le service pénitentiaire organise des jeux. Les témoignages font état d’un grand nombre de règles et de contraintes : garder les mains dans le dos, s’accroupir lorsqu’on en reçoit l’ordre ou ne pas pouvoir choisir les membres de son équipe.

Les détenus ne peuvent pas demander à travailler durant les six premiers mois de leur peine.

Les opportunités d’emploi sont rares en prison. Certains détenus peuvent être affectés aux services de buanderie ou à d’autres tâches d’entretien, mais aucune véritable activité axée sur les compétences n’est disponible. Les employés reçoivent chaque semaine un petit salaire.

Seules certaines phases de la détention (appelées treatment (traitement) et pre-release (pré-libération)) prévoient de donner une occupation aux prisonniers.

La phase de “réinsertion” (aftercare), qui intervient en fin de peine,comprend une formation professionnelle et une aide à la recherche d’un emploi pour certains détenus. Elle est prise en charge par la SCORE (Singapore Corporation of Rehabilitative Enterprises, Société des entreprises de réadaptation de Singapour). La SCORE conclut, en 2015, des accords avec 4 745 employeurs, qui embauchent d’anciens prisonniers. Les principaux secteurs sont l’agroalimentaire, l’hôtellerie, la logistique et l’industrie manufacturière. 16% des prisonniers (2,042 détenus) étaient assurés, en 2015, de trouver un emploi à leur libération. Ce chiffre représente une augmentation de 9.5% comparé à l’année précédente.

Ces résultats semblent modestes si on les compare à l’importance considérable attribuée, pendant les quinze dernières années, à la “réinsertion dans la stratégie de communication du SPS”.

Détenus travaillant

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Le centre Kaki Bukit, à l’intérieur de la prison Tanah Merah, est la seule structure d’éducation et de formation des prisonniers. Les prisonniers peuvent passer leur GCE (General Certificate of Education, Certificat général d’éducation), N-Level, O-Level (équivalents au brevet) et A-Level (équivalent au baccalauréat). 1.9% des prisonners (239) réussissent, en 2015, à l’un de ces examens. Les détenus n’ont qu’un an pour préparer un diplôme qui en nécessite normalement quatre. En 2015, 75.6% des prisonniers inscrits aux cours “N-Level” ont réussi l’examen. Le SPS a mis en place un parcours de réinsertion pour les prisonniers. Ce parcours est divisé en trois étapes principales :

  • in-care : le détenu purge sa peine en milieu fermé
  • halfway care (mi-parcours) : les prisonniers peuvent avoir accès à des amnéagements de peine et purger la fin de celle-ci au sein de la communauté
  • aftercare (réinsertion) : les anciens prisonniers peuvent bénéficier de soutiens pour réintégrer la société

Une “feuille de route personnelle” (PRM, Personal Route Map) est mise en place pour chaque prisonnier à son arrivée, en fonction de ses besoins et des risques qu’il présente.

Aucune formation n’est proposée aux prisonniers tout au long de l’étape dite de “dissuasion”. Celle-ci couvre la majeure partie de la peine d’emprisonnement. Selon le SPS,cette mesure permet aux prisonniers de “subir, à des fins dissuasives, les rigueurs de l’incarcération, et […] leur donne le temps de s’adapter à leur détention, de réfléchir à leurs actes et de se préparer à leur phase de traitement.”

Lorsque l’incarcération atteint sa dernière étape, appelée “traitement”, les détenus suivent des programmes éducatifs selon sur les besoins identifiés sur leur feuille de route. De l’aveu du SPS même, la participation à ces programmes dépend de la disponibilité et de la priorité. Aucune indication n’est fournie quant nombre de prisonniers qui y participent réellement.

Les prisonniers sont censés bénéficier, pendant les étapes “pré-libératoire” et “de suivi”, de programmes de préparation à la réinsertion.

Le réseau CARE (Community Action for the Rehabilitation of Ex-offenders Network, Action communautaire pour la réinsertion des ex-délinquants (CARE) Network est un consortium de neuf agences proposant des solutions de réinsertion aux prisonniers.On y compte :

  • la Singapore After-Care Association (SACA)
  • la Singapore Anti-Narcotics Association (SANA)
  • la Singapore Corporation of Rehabilitation Enterprise ( (SCORE)
  • la Industrial & Services Co-Operative Ltd (ISCOS)
  • le Yellow Ribbon Project

Les données sur le nombre de prisonnies réellement aidés par ces programmes sont opaques. Les efforts semblent plus porter sur la communication que sur les bénéficiaires réels. La bourse de formation du Yellow Ribbon Fund Yellow Ribbon Fund Skills Training Assistance to Restart, bourse START, créée en 2010, n’a bénéficié qu’à 73 personnes, dont seulement 23 ont obtenu un diplôme.

Les prisonniers ne sont pas autorisés à avoir la télévision ou la radio. Les stylos, le papier et les livres reliés sont également interdits.

Trois livres brochés par mois sont autorisés. Les prévenus peuvent recevoir trois livres à couverture souple ou magazines par semaine.

Le SPS censure, dans les journaux remis aux prisonniers, certains articles. Les détenus doivent lire des journaux incomplets.

Les prisonniers arrivants sont escortés, menottés et entravés, à l’endroit de leur prise en charge. Les agents, assistés par des chiens dressés, effectuent des fouilles à nu pour vérifier l’absence d’objets interdits. Il est interdit, par exemple, de posséder des photographies personnelles, sauf autorisation spéciale.

Le dossier du prisonnier est alors établi. Il comprend taille, poids, pièce d’identité avec photo, empreintes digitales, ainsi que sa “feuille de route”. (cf. Education et Formation Professionnelle.

Le prisonnier est ensuite tondu. Il doit porter une ceinture avec son numéro d’identification imprimé dessus. Une dernière fouille à nu est effectuée avant la remise du trousseau : uniforme (un T-shirt blanc, un short bleu et une paire de claquettes), une natte de paille et un kit d’hygiène.

Il y a cinq appels par jour bien que la plupart des détenus restent en cellule 23 heures par jour. Le premier appel a lieu à 6h30 du matin. Cinq sonneries avertissent les prisonniers. Trois autres appels ont lieu à 9h, 12h et 15h. Le dernier appel a lieu à 19h. L’heure du coucher des détenus est fixée à 21 heures. Les lumières et les caméras restent allumées en permanence.

Le centre de commandement est chargé de contrôler toutes les activités dans l’établissement. Les portes électroniques et la vidéosurveillance revêtent une importance cruciale (3 000 caméras environ dans le seul Cluster B).

Les prisons de Singapour sont connues pour la sévérité de la discipline imposée aux prisonniers. La loi sur les prisons (Prisons Act) recense les infractions mineures et aggravées au réglement et les peines prévues. Les infractions mineures comprennent : parler pendant les heures de travail, ou parler fort, rire ou chanter en dépit d’un ordre contraire d’un membre du personnel; se quereller avec un autre prisonnier; manquer de respect à un membre du personnel ou à un visiteur officiel; sortir des rangs, volontairement ou non, lors d’un déplacement dans la prison; aller aux toilettes sans l’autorisation d’un surveillant ou y rester plus longtemps que nécessaire; refuser de s’alimenter; désobéir à un ordre légitime d’un membre du personnel; toute autre conduite portant atteinte au bon ordre de l’établissement.

Entre autres sanctions, une infraction mineure au règlement est passible de mise à l’isolement disciplinaire pour une période pouvant aller jusqu’à sept jours. Les sanctions sont prononcées par le directeur après enquête.

La seconde récidive est considérée comme une infraction aggravée.

Les sanctions peuvent être, entre autres : la flagellation, jusqu’à 12 coups de canne; le placement en cellule disciplinaire pour une période allant jusqu’à 7 jours. Les cellules disciplinaires sont peu éclairées et aérées. Elles sont équipées de toilettes turques. Les murs sont capitonnés.

L’isolement peut être porté, dans la prison militaire (“Detention Barracks”), à 14 jours. Le Criminal Law Temporary Provisions Act (Loi sur les dispositions provisoires en matière de droit pénal), permet le placement à l’isolement, sans procès, pendant toute la durée de la détention.