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Yémen : des détenus sont torturés et maintenus en détention arbitraire pendant des années, puis contraints à l’exil lors de leur libération

Un rapport d'Amnesty International publié le 27 mai 2021 rappelle aux autorité Houthies qu'elles ne doivent pas de facto se servir de manière arbitraire des prisonniers comme de pions sur l'échiquier des négotions politiques.

Ce rapport, intitulé “Released and Exiled: Torture, unfair trials and forcible exile of Yemenis under Huthi rule”, est le fruit d’une enquête minutieuse sur ce qu’a vécu une minorité de non-combattants, dont des journalistes, des opposants politiques et des membres de la minorité religieuse baha’ie, libérés dans le cadre d’accords politiques en 2020, après avoir été détenus illégalement et torturés pendant des périodes allant jusqu’à sept ans. Une fois libérés, les Baha’is ont été contraints à l’exil, les Nations unies facilitant leur départ, tandis que huit prisonniers ont été bannis vers d’autres régions du pays.

Ce rapport met en lumière le fait que les prisonniers sont utilisés comme des pions sur l’échiquier politique, l’exil et le déplacement forcés étant inscrits dans des accords négociés par les autorités houthies de facto. Après avoir subi pendant des années des violences terribles et la détention illégale, les détenus présentés dans ce rapport n’ont pas connu de répit une fois remis en liberté, puisqu’aucun d’entre eux n’a pu rentrer chez lui et retrouver sa famille après des années de séparation forcée” a déclaré Heba Morayef, directrice régionale pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International.

Nul ne devrait avoir à choisir entre demeurer en détention illégale et quitter son foyer ou son pays. En aucune circonstance, des accords négociés portant sur la libération de prisonniers ne devraient permettre explicitement ou implicitement que les prisonniers libérés soient exilés ou déplacés de force de chez eux.

En octobre 2020, les responsables houthis ont libéré 1 056 prisonniers dans le cadre d’un accord négocié au niveau politique, coparrainé par l’ONU et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Il s’agissait en vaste majorité de combattants, mais une vingtaine d’entre eux n’en étaient pas. Auparavant, en juillet 2020, les responsables houthis avaient libéré six membres de la minorité religieuse baha’ie. Amnesty International s’est entretenue avec 12 de ces détenus qui n’auraient jamais dû être emprisonnés – sept journalistes, un employé du gouvernement et quatre Baha’is.

Dix d’entre eux ont été détenus pendant des périodes allant de deux à trois ans, avant d’être informés des accusations portées contre eux. Dans neuf cas, un tribunal avait ordonné leur libération en mars et avril 2020. Cependant, les autorités houthies les ont maintenus en détention arbitraire pendant encore des mois, et ne les ont relâchés que plus tard, à la faveur d’accords politiques.