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Turquie : prisons, le pays développe "un modèle inhumain"

Près d’Istanbul, le complexe de Silivri accueille les opposants au pouvoir, condamnés pour “terrorisme” après des audiences truquées. Parmi les 23 000 prisonniers souvent maintenus à l’isolement, certains y purgent des détentions provisoires qui s’éternisent.

L’actualité judiciaire en Turquie correspond à une kyrielle de procès politiques que la pandémie du coronavirus n’aura qu’à peine interrompue : procès Gezi, Cumhuriyet, Oda TV, Amnesty International, avocats du CHD, élus du HDP… On parle ici d’audiences qui ressemblent à des pièces de théâtre morbides où l’on accuse sans preuve, on plaide sans être entendu et on écoute sans impartialité. Elles débouchent en général sur des condamnations, des communiqués dénonçant l’absence d’indépendance de la justice et, in fine, des articles de presse dans lesquels les noms des accusés finissent par se confondre et les actes d’accusation semblent réduits à un mot : terör.

Il y a quelques décennies, comme dans les années 90 au plus fort de la guerre contre la guérilla kurde du PKK, réprimer rimait avec torture et enlèvements en Turquie. Désormais, cela a pris une autre forme : l’utilisation de l’appareil judiciaire à des fins répressives, envers et, souvent, contre le droit. “La justice devrait être le recours en cas de violation des droits de l’homme, explique Andrew Gardner, spécialiste de la Turquie à Amnesty International. Aujourd’hui, c’est la justice qui viole les droits des individus.”