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Tchad : prison secrète de l’ANS, des détenus racontent les sévices subis

Au Tchad, il y a quelques jours, on vous parlait de la découverte par la Convention tchadienne de défense des droits de l’homme d’une prison secrète de l’Agence nationale de sécurité. La CTDDH dénonce un véritable mouroir.

Le gouvernement, lui, parle de cachots où les détenus sont “très bien” traités. RFI a retrouvé cinq anciens pensionnaires de ce centre de détention, dont deux ont accepté de témoigner à visage découvert.

La prison secrète de l’Agence nationale de sécurité est située sur la route de Farcha, en face du ministère des Travaux publics et des infrastructures. Versinis Dingamnayal, le président du Collectif contre la vie chère, y a séjourné une première fois en avril 2017 à la suite d’une grève des commerçants. Daniel Ngadjadoum l’y avait précédé deux mois plus tôt pour une tribune sans concessions contre le président Idriss Deby.

Leurs versions sont concordantes. Tous deux assurent qu’ils ont été conduits dans ce centre de détention les yeux bandés. Une fois sur place, ils ont été “jetés” dans une petite cellule surpeuplée. Versinis Dingamnayal raconte au micro d’Esdras Ndikumana, du service Afrique de RFI : “Quand j’ai été amené dans le cachot, j’étais menotté et enchaîné… La prison était lugubre, noire !”

Des sévices, programmés entre 23h et 4h du matin, ont commencé dès le premier jour de détention, selon ces témoins. Daniel Ngadjadoum raconte à son tour : “Du piment dans les yeux, (des coups) de bâton, de câble électrique… On vous enfonce un tuyau dans le ventre, on ouvre le robinet à forte pression et l’eau vient vous remplir l’estomac… Et après, on enlève le tuyau et on marche sur votre ventre…”

Autre variante des supplices : du piment en poudre dans un sac en plastique et la tête du supplicié enfermée dans le sac en plastique, raconte Versinis Dingamnayl. Puis, “ils versent de l’eau” sur la tête. “Et pendant ce temps, nous mourrons de faim”, ajoute-t-il. Un seul repas est servi par jour.

Tous deux sont des personnalités publiques : les médias locaux et internationaux se sont tout de suite saisis de leurs cas et ils vont être relâchés rapidement. À l’époque, des médecins ont constaté les sévices subis par l’opposant et le militant de la société civile, qui ont porté plainte.

À ce jour, aucune action n’a encore été engagée contre leurs tortionnaires, assurent-ils.