Enquêtes / Reportages

Ils font entrer à l’intérieur la vie de l’extérieur.
Des programmes radiophoniques sont dédiés aux personnes détenues et à leurs familles. Souvent, le principe est le même : Chacun peut appeler pour passer son message à un frère, une fille, un ami en prison, ou juste pour prononcer quelques phrases de soutien. Entre les murs, passent ainsi des mots d’espoir, de souffrance, d’amour. Parfois aussi, les familles dénoncent, témoignent et débattent. Les animateurs eux, reçoivent et accompagnent ces mots, s’effacent ou prennent parti : radio et prison entretiennent ainsi depuis longtemps des liens étroits et nécessaires, indispensables pour certains. Rencontre avec ceux qui tissent ces précieuses relations.

Parfois, cela ressemble à des télégrammes, presque des messages codés. Comme un appel d’Hélène sur le Téléphone du dimanche, de Radio Notre Dame. “Marco est toujours fidèle au poste. Quant à Véronique, son mari a été muté à Menton. Coralie mesure 1m96.” En quelques minutes, Hélène voudrait faire entrer dans la cellule de son ami, Eric, l’intégralité d’un monde extérieur qu’ils avaient en commun.
Les appels sont diffusés en direct à l’antenne, et les nouvelles tombent une à une, compactes et froides. Puis tout à coup, Hélène pleure, se confie : “C’est de plus en plus difficile…je t’embrasse très fort…sois courageux Eric”.

C’est souvent ainsi au cours de l’émission, le dimanche, entre 17 et 18h : les nouvelles très précises, comme écrites à l’avance pour ne pas en oublier, croisent les confidences et les peines. Certains auditeurs se répondent, comme Mélanie qui “voulait juste dire chapeau à Hélène de tenir le coup comme ça”. Elle fait partie de ceux qui appellent uniquement pour délivrer des messages de soutien : “On ne sait pas qui sont toutes les personnes que l’on entend, dont on parle, quels visage elles ont, mais on fait naître un peu de lumière. Qu’un seul tienne, les autres suivront”.
Parfois, au simple message d’encouragement, succède un vibrant message d’amour. “Je pense à toi, je t’aime, je crois que c’est de plus en plus“, confie Corinne à Emmanuel. Et même si ce n’est pas Emmanuel qui répond, mais Bérangère, l’animatrice, qui reprend la parole, ceux qui appellent savent qu’on les écoute. “Je te rappellerai dimanche”, entend-on souvent à la fin des messages.

Lorsque son fils est sorti de prison, et il est passé à l’accueil de la radio. Il est venu dire "merci, sans le téléphone du dimanche, je n’aurais pas tenu trois ans"

Pour Leïla, parler sur les ondes est une façon de protéger son mari, et de témoigner pour tous les autres.

Le temps, les jeunes de l’EPM l’égrainent, le distendent, le racontent et le décryptent à leur manière. Une histoire émouvante et personnelle.