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France : la prison, rite initiatique du parcours délinquant

Un prévenu récidiviste qui sourit et défie du regard la substitut du procureur alors qu’il s’apprête à écoper de 28 mois de prison : au palais de justice de Vannes, la désinvolture des jeunes poursuivis pour trafic de stupéfiants en dit long sur leur itinéraire délinquant.

Le 15 janvier dernier, la condamnation est tombée froidement. Dans une salle d’audience quasiment vide car le jugement se déroulait dans le cadre d’un renvoi de comparution immédiate. Le coupable, âgé de 24 ans et demeurant à Vannes, a pris directement le chemin de la prison pour vingt-huit mois, à l’occasion de sa seconde condamnation en l’espace de trois mois, toujours pour trafic de cocaïne. Sous les seuls yeux de deux membres de sa famille. Sans le soutien du moindre de ses habituels copains du quartier de Ménimur, eux qui viennent parfois pour inciter certains prévenus à continuer de jouer aux caïds. Ce jeune savait qu’il allait plonger seul pour de longs mois. Mais il n’a donné aucun nom, aucun détail sur l’organisation du réseau. Il a uniquement évoqué une dette liée à une précédente vente qui avait mal tourné. Tout cela en souriant aux trois juges, en fixant la substitut du procureur de la République, comme pour la défier. De la même manière qu’il avait tenu des propos à la limite des injures aux policiers, selon leurs constatations d’enquête, quand ils avaient découvert de la cocaïne cachée sous un matelas à son domicile…

Comme sur les plumes d’un canard

Depuis de longs mois, les peines de prison ferme s’accumulent pour des dizaines de jeunes habitants des quartiers de Kercado et Ménimur. Mais elles semblent glisser sans guère de ressenti sur nombre d’entre eux au prononcé de leur jugement. Comme si pour eux cette étape était incontournable, voire obligatoire, dans leur parcours initiatique de dealer. Il n’y a qu’à venir au palais de justice pour constater leur désinvolture, voire leur bravoure, sur le banc des prévenus. Il n’y a qu’à écouter la lecture de leur casier judiciaire et leurs états de récidive, alors qu’ils ont à peine dépassé la vingtaine d’années. Sans parler de ces mineurs, certes poursuivis, mais qui échappent aux audiences publiques.

Nombre de ces jeunes vivent souvent encore chez leurs parents. Sans projet professionnel, attirés par l’argent facile, en jouant les guetteurs, les rabatteurs et les vendeurs, souvent pour payer leur propre consommation de stupéfiants ou/et pour satisfaire leurs besoins matériels. Les condamnations passent sans que le trafic ne trépasse. Car si des têtes tombent, elles sont rapidement remplacées. Les plus importantes, elles, ne sont pas souvent atteintes.

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