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Argentine : la polémique enfle autour de la sortie de prison de détenus

Une partie de la société argentine s’indigne contre une supposée "libération massive" de détenus en période de coronavirus, loin d’être vérifiée dans les faits.

“Ne les libérez pas !” En Argentine, de nombreux messages se multiplient sur les réseaux sociaux contre la sortie de prison de détenus en période de coronavirus. Les publications ont un ton volontiers agressif − “qu’ils pourrissent en prison” − et sont parfois accompagnées de photos de victimes de crimes violents commis ces dernières années.

Alors que de nombreux pays à travers le monde ont aménagé leurs prisons et fait sortir des détenus afin de limiter les risques de contagion, en Argentine, les sorties de prisonniers créent la polémique. Jeudi 30 avril, des milliers de personnes à travers tout le pays se sont penchées à leurs fenêtres pour un cacerolazo (un concert de casseroles, mode de manifestation courant en Amérique latine) “contre la sortie massive de détenus”.

“Les prisons argentines ne sont pas en mesure de faire face à l’épidémie, explique pourtant Alcira Daroqui, sociologue et directrice du Groupe d’études sur le système pénal et les droits de l’homme de l’université de Buenos Aires. Il y a des rats, des inondations régulières, il n’y a quasiment jamais de visites médicales…” Les prisons sont également surpeuplées : la province de Buenos Aires compte près de 50 000 détenus pour moitié moins de places disponibles. La population carcérale totale du pays est estimée à 100 000 personnes − il est difficile d’obtenir un décompte exact car certaines détentions s’effectuent dans des commissariats en raison de la surpopulation dans les prisons.

Grève de la faim

Ces dernières semaines, des émeutes ont éclaté dans plusieurs pénitenciers, les détenus réclamant des sorties anticipées et davantage de mesures de prévention face au coronavirus, qui a fait 246 morts en Argentine au 3 mai. Fin avril, à Florencio Varela, dans la banlieue de Buenos Aires, des affrontements entre des prisonniers et des gardiens se sont soldés par la mort d’un détenu de 23 ans, tué par balle. Trois gardiens ont été arrêtés pour homicide et dissimulation de preuves. A Santa Fe, province du centre du pays, des centaines de prisonniers ont entamé une grève de la faim le 27 avril.